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30/01/01

Eric Joulié, KPNQwest: "Chaque centre nous coûte 70 millions d'Euros."

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Joint-venture entre l'opérateur néerlandais KPN et l'américain Qwest, KPNQwest se définit comme un opérateur de données pan-européen. Fin décembre, 3 anneaux ont été déployés sur son plan de 7 Eurorings visant à relier les plus grandes villes d'Europe entre elles sur près de 20 000 km réels. Pour l'année 2000, l'entreprise enregistre un chiffre d'affaires de 461,6 millions d'Euros, soit plus du double par rapport à 1999. De 25 personnes en France il y a un an, son effectif local est passé à 90 en décembre et devrait encore augmenter selon ses prévisions à environ 150 collaborateurs fin 2001. Positionnée sur trois marchés principaux, opérateurs et ISP, multinationales, PME et grandes entreprises françaises, la filiale leur offre des services couvrant depuis l'accès physique à son réseau IP jusqu'à l'hébergement, en passant par la gestion de bande passante. Le directeur général de KPNQwest France, Eric Joulié, revient sur les problématiques liées à son métier et les choix stratégiques de son entreprise.


JDNet Solutions : Sur l'ensemble de vos activités, quelle est votre première source de revenus ?
Eric Joulié : L'année 2000 a été très intéressante en terme de prise de commande. Nous avons signé de très grandes références multinationales sur notre produit ATM et un peu moins en matière de réseaux privés virtuels sur IP. Dans les grands comptes, l'ATM continue d'être le coeur de cible majoritaire pour la construction du réseau principal.
En VPN/IP, qui est le deuxième pôle de notre CA, la couverture est moins évidente. Avec la montée en puissance de l'accès Internet, nous avons lancé cette offre en fin d'année dernière et nous avons déjà travaillé sur trois projets significatifs en France. A présent, nous pouvons considérer que lorsque nous vendons de l'accès Internet à des entreprises, nous vendons en même temps du VPN/IP. Notre stratégie s'axe de plus en plus là-dessus.
Pour cette année 2001, nous prévoyons dans l'ordre de réaliser des bénéfices avec le VPN/IP, l'ATM et l'hébergement. Vis-à-vis des opérateurs, nous allons aussi revendre une partie de notre capacité en fibre optique et en bande passante.


Vous venez de lever une somme colossale de 500 millions d'Euros. Qu'allez-vous en faire ?
Les analystes financiers ont vu cette levée de fonds comme un signe très fort vis-à-vis de notre stratégie. Nos objectifs sont principalement tournés vers le développement des Eurorings, des réseaux nationaux et l'ouverture de cybercenters.


Etes-vous toujours candidat au dégroupage de la boucle locale ?
Nous avons été l'un des sites d'expérimentation à Tocqueville, à Paris, et nous avons arrêté quand nous avons commencé à vouloir mettre en place notre seconde étape à Lyon. Stratégiquement, nous avons fait un bond en arrière sur le plan de l'ADSL en nous focalisant plutôt sur l'achat que sur la construction. Les investissements sont colossaux quand il faut se battre contre 15 opérateurs. Notre stratégie nous permet ainsi de nous centrer sur la construction de cybercenters et de nos Eurorings.


Est-ce la seule raison ?
Il est vrai qu'au départ, notre ambition était de devenir un opérateur ADSL au plus fort sens du terme. A la fin du troisième trimestre 2000, nous avons décidé de pratiquer cette activité dans certains pays seulement comme la Finlande et l'Allemagne. Pour les autres, nous achèterons de la bande, ce qui nous a permis d'annoncer que nous serions cash-flow positif un an plus tôt. Et même en Allemagne, nous n'allons équiper que 300 DSLAM au lieu de 600.


N'y a-t-il donc aucune raison liée à France Télécom ?
Nous avons participé activement aux deux phases de développement. Au départ, notre négociation avec France Télécom à l'ART se passait plutôt bien. Puis, en septembre les relations sont devenues plus difficiles avec FT, principalement pour des raisons de coûts et de business plan. En France, personne n'est aujourd'hui capable de fournir une solution ADSL. France Télécom se propose de vendre l'accès environ 3 000 francs par répartiteur, or il y en a 12 000 en France. Du coup, il est plus intéressant pour nous de travailler avec des opérateurs locaux.


KPNQwest a-t-elle des activités mobiles ? Comment vous positionnez-vous par rapport aux technologies UMTS de prochaine génération ?
Nous ne sommes pas du tout opérateur mobile. Nous sommes intéressés vis-à-vis du Wap pour héberger des serveurs et des passerelles. Sinon, nous avons aussi signé un partenariat avec AirSlide pour une technologie permettant de faire basculer le trafic GSM sur IP. En particulier dans le contexte de la téléphonie de troisième génération à haut débit, les réseaux GSM auront certainement du mal à répondre à la demande.


Il y a un an, vous prévoyiez de devenir un important acteur du marché de l'hébergement en France ? Qu'en est-il aujourd'hui ?
Sur les 10 000 m2 prévus en France, nous sommes en train de terminer notre première tranche de 500 m2. La deuxième tranche de 2 000 m2 devrait être prête cet été, et nous prévoyons de finaliser notre cybercenter de 10 000 m2 - la taille d'un terrain de football - d'ici la fin de l'année 2001. Chaque centre nous coûte environ 70 millions d'Euros.


Vous dites assurer un service de bout en bout sans couture dans vos centres. Jusqu'où allez-vous en terme de valeur ajoutée ?
Nous présentons une approche évolutive, depuis les services de base pour l'hébergement des équipements d'opérateurs, jusqu'à la mise à disposition de serveurs dédiés avec une étape supplémentaire de gestion des services qui comprend des aspects tels que l'administration des sauvegardes.
Pour l'instant, notre approche du développement applicatif s'effectue plutôt au travers de partenariats. Nous avons aussi conclu un accord avec Perfect Technologies, par exemple, afin de fournir des solutions clefs en main de streaming. Enfin, nous allons héberger la plate-forme de OpenText qui est située chez Atos Origin suite à un autre partenariat signé avec cette dernière.


Quelle est votre position par rapport au débat sur la qualité de service (QoS) ?
Nous sommes très sensibles à la qualité de service, d'autant plus que notre réseau est très sécurisé. L'un des principaux problèmes que rencontrent nos concurrents un peu plus âgés que nous est que leurs réseaux sont en général peu homogènes, et qu'ils dépensent du temps afin de les faire cohabiter. En ce qui nous concerne, nous avons réalisé des choix homogènes dans les différents pays d'Europe. Nous avons même fait le choix de ne pas encore implémenter le MPLS car nous ne rencontrons aucun problème d'engorgement sur notre réseau. Ensuite, pour gérer les flux en boucle locale, nous avons opté pour la solution DiffServ qui permet de gérer les priorités entre les flux de paquets IP. Et nous déployons des boîtiers de type Packet Shaper de la société Packeteer afin de pouvoir gérer les priorités de certains flux seulement à certains moments.


Et concernant les accords sur la QoS, c'est à dire les fameux SLA ?
Nous associons des engagements aux SLA, et si nous ne les respectons pas nous devons des pénalités. Nous avons aussi développé un service client centralisé à Amsterdam qui prend tous les appels au niveau européen. Il s'occupe d'une hotline de premier niveau, et si le problème requiert davantage nous redescendons dans chaque pays. Et aussi, nous avons un outil de ticketing qui permet de gérer les escalades. Si un incident n'est pas réglé, il est monté en escalade au niveau de la hotline. A côté, le client dispose de logiciels pour gérer sa bande passante.


Avez-vous prévu de racheter des sociétés en France ?
Nous sommes à l'écoute de toute opportunité intéressante dans des domaines complémentaires du nôtre. Notre stratégie de croissance externe consiste à nous rapprocher du client ou à monter en valeur ajoutée.


Quelles sont les évolutions prévues pour votre offre, d'ici la fin de l'année ?
Dans le cadre de la montée en puissance de notre offre VPN/IP, nous allons bientôt prendre en compte la population nomade. Notre brique firewall va évoluer en élargissant nos possibilités d'action à un instant T. Nous allons aussi apporter un focus important à propos de la voix sur IP.
Concernant l'hébergement, nous réfléchissons à des solutions packagées. En Allemagne, Dell commercialise une offre qui intègre l'hébergement dans nos cybercenters et c'est à ce type de solutions que nous voulons arriver. L'objectif est d'avoir pratiquement du prérevendu.
Sur la partie vente indirecte auprès des PME/PMI, nous allons bientôt annoncer la signature d'un partenariat avec un grand de la distribution. Le premier produit que nous allons développer par ce biais sera intitulé 1st Link et consistera en un accès professionnel à Internet. Enfin, nous allons également profiter de la capacité de notre réseau pour lancer d'ici 15 jours une offre promotionnelle en offrant 2 Mbps pour le prix d'un seul.


Eric Joulié
, 38 ans, rejoint KPNQwest en 1999 en tant que vice-président chargé du développement de l'activité commerciale sur l'Europe du Sud, et est nommé directeur général France en février 2000. Avant d'intégrer la direction de l'opérateur, il travaille de 1995 à 1999 chez le spécialiste de la sécurité électronique Sensormatic Corp., au sein duquel il occupe successivement les postes de directeur des ventes de la division "commerce spécialisé", puis de directeur commercial. Après avoir débuté sa carrière en 1985 en tant qu'ingénieur commercial au sein de la division Finance du constructeur Unisys, il devient ingénieur commercial senior chez Digital Equipment France en 1987, puis se voit confier en 1990 par l'opérateur AT&T la responsabilité de créer sa division "Grands systèmes sous Unix".


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