03/06/2001
Tim Howes, Loudcloud: "Notre
hébergement virtuel élimine l'erreur humaine"
Fondée
en septembre 1999 par quatre anciens membres de la
direction américaine d'AOL, dont son ex-dirigeant
Ben Horowitz et le très renommé Marc Andreessen
(ancien co-fondateur de Netscape), Loudcloud
se présente comme un fournisseur de services d'infrastructure
logicielle Internet. Avec une offre d'externalisation complète
des applications web de l'entreprise reposant sur des technologies
maison, cet "hébergeur virtuel" arbore
un positionnement original qui permet aux dotcoms et aux
grandes entreprises de se défaire de toutes les contraintes
liées aux technologies. Au bout d'un an et demi,
Loudcloud emploie déjà près de 550 collaborateurs
dans le monde. Lors d'un déplacement à Paris,
nous avons rencontré Tim Howes, président
des opérations produits et l'un des co-fondateurs
de l'entreprise, mais également le co-auteur du protocole
d'annuaire LDap. Celui-ci nous explique les intérêts
du positionnement original de Loudcloud et de sa technologie
Opsware, révolutionnaire en matière d'automatisation
de la maintenance.
JDNet
Solutions : que vendez-vous précisément aux
entreprises ?
Tim Howes : Nous fournissons une solution
d'hébergement complètement externalisée
qui comprend l'infrastructure, le matériel, les logiciels
et tous les services associés. Ainsi, les entreprises
peuvent entièrement s'abstraire des aspects techniques
qui ne concernent pas leur métier. Nous ne possédons
aucun datacenter ni infrastructure de réseaux comme
les backbones, et nous nous reposons pour cela sur nos partenaires
qui sont les plus grands opérateurs mondiaux, comme
AT&T et MCI. Nous louons des cages dans leurs centres
et profitons de leurs capacités en terme de connectivité.
Nous avons aussi des partenariats avec de nombreux intégrateurs
de systèmes.
A quel type de demande répondez-vous
avec votre offre d'externalisation ?
La complexité des infrastructures
logicielles s'accroît, et nous constatons que près
de 99 % des pannes que rencontrent les sites interviennent
à ce niveau. En parallèle, les réseaux
connaissent de nombreuses avancées et nous nous attendons
à ce que ces tendances perdurent encore au cours
des prochaines années. Dans cette situation, les
clients rencontrent de nombreuses difficultés, notamment
lorsqu'ils veulent être connectés à
leurs partenaires. Face à ces problématiques,
il faut pouvoir répondre sur tous les plans, aussi
bien en terme de gestion des changements que de sécurité.
Et dans
ce dernier cas comme dans d'autres, les techniques sont
impliquées au même titre que les processus.
Or, beaucoup de nos clients veulent pouvoir se recentrer
sur leur métier.
Comment procédez-vous
pour infogérer les infrastructures web applicatives
?
Aujourd'hui, le marché évolue
beaucoup vers le conseil. Mais il devient de plus en plus
difficile d'employer des personnes qualifiées. De
plus, lorsque vous les recrutez, il faut les former. Or,
une fois qu'elles sont opérationnelles, elles peuvent
aussi s'en aller avec toutes les connaissances qu'elles
ont apprises. Nous avons donc réfléchi à
des manières d'utiliser la technologie pour réduire
ces risques, et notre idée a été de
capturer les connaissances dans un système logiciel
que nous avons développé nous-même.
De quoi s'agit-il, exactement
?
Ce système se présente sous
la forme de deux principales composantes. La première
tente de répondre à des questions de type
: "Comment configurer tel ou tel serveur, routeur ou
firewall ?". Dans ce cas, il suffit de prendre la tâche
et de l'automatiser, et nous avons créé pour
cela la deuxième composante, l'environnement Opsware
qui fonctionne de manière totalement automatisée.
Lorsque nous installons un nouveau serveur, le système
se charge tout seul de le surveiller, de le sécuriser
et d'inclure, par exemple, les dernières mises à
jour applicatives. Derrière, les techniciens qui
opèrent les infrastructures effectuent des tests
et documentent leurs travaux.
Afin d'éviter les divergences, nous construisons
un modèle du site du client. Nous disposons d'un
environnement de tests régressifs et nous avons tout
un département qui passe son temps à tester
les nouvelles configurations.
En quoi votre approche de l'externalisation
est-elle révolutionnaire ?
Il s'agit d'une démarche complètement
nouvelle, qui consiste à déployer automatiquement
les changements que nous pratiquons sur le modèle.
En procédant ainsi, nous éliminons quasiment
toute possibilité d'erreur humaine.
Vous êtes co-créateur
du protocole LDap. Utilisez-vous les technologies d'annuaires
pour représenter les composantes d'un système
?
Non, ce que nous utilisons est plus compliqué
qu'un annuaire car les relations entre les différentes
composantes sont trop complexes. Nous avons recours à
une base de données relationnelle dans laquelle nous
enregistrons toutes les informations sur le matériel,
les logiciels, l'architecture, l'infrastructure, etc. Et
il ne s'agit pas seulement de représenter les applications,
mais aussi de savoir comment les configurer.
Quelles
sont les nouveautés dans votre dernière version
d'Opsware, opérationnelle depuis février ?
Celle-ci comporte deux évolutions
majeures, dont l'accroîssement du nombre de technologies
que nous supportons. A présent, nous savons gérer
en totalité de façon automatisée 67 technologies
différentes. Ensuite, nous avons rajouté la
possibilité de coordonner des composantes. Par exemple,
lorsque nous rajoutons un nouveau serveur, la nouvelle de
son installation est automatiquement propagée vers
les autres composantes comme le firewall ou même le
serveur d'applications.
Comment
procédez-vous pour prendre en compte une nouvelle
application ?
Autour de la plate-forme centrale, nous avons
rajouté plusieurs nouveaux modules dont l'un s'appelle
Code Deployment. Avant d'être capable de faire fonctionner
une nouvelle application intégrée, il existe
des centaines d'actions à mener, notamment en matière
de configuration. Or, si ces opérations sont accomplies
manuellement, cela implique d'importants risques d'instabilité
pour le site web.
Nous avons donc défini quatre étapes. Tout
d'abord, nous répliquons en miniature la plate-forme
dans un environnement de tests. Nous y appliquons les nouveaux
codes programmés, puis nous les vérifions.
Une fois ces trois premiers pas accomplis, nous pouvons
déplacer le nouvel applicatif en production. En procédant
ainsi, nous pouvons, en cas de problème, revenir
à la précédente version. Là
où il fallait auparavant des heures, cela ne nous
prend plus que 30 minutes, tout en rendant les processus
plus fiables.
Allez-vous commercialiser dans
l'avenir votre technologie Opsware sous la forme d'un logiciel
ou d'une suite ?
Non. Nous allons continuer à fournir
des services, et pas des technologies packagées.
Et si les clients demandent à acquérir nos
technologies, ou veulent un service particulier chez eux,
nous pouvons très bien dans l'état actuel
des choses leur founir à la place les services qu'ils
demandent en passant par notre technologie.
Co-fondateur de Loudcloud et son "president of products
operations", Tim Howes est aussi le co-inventeur
du protocole TCP/IP de créations d'annuaires LDAP
(Lightweight
directory access protocol). Grâce à cela, il
a notamment été considéré en
1996 aux Etats-Unis comme l'un des 25 gourous technologiques
les plus influents du monde de l'Internet. Avant de participer
à la formation de Loudcloud, il était vice-président
des technologies chez AOL, qu'il a intégré
lors du rachat de Netscape, l'entreprise pour laquelle il
travaillait auparavant comme chief technology officer (directeur
des systèmes d'informations) de la division produits
serveurs. A ce titre, il a lui-même été
l'architecte responsable de plusieurs plates-formes serveurs
de l'éditeur de Netscape Navigator. Titulaire d'un
Ph.D en Computer Science de l'université du Michigan,
il a démarré sa carrière comme chercheur,
puis directeur de projet à la National Science Foundation
située au sein de ce campus.
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