20/04/01
Ernst
Jilderda, Augeo : "Apporter autant d'informations à
l'individu qu'il en apporte à l'entreprise"
Face
à la multiplication des grands projets e-business,
les SSII doivent se doter de moyens leur permettant de faire
face à une demande de plus en plus exigeante de la
part de leurs clients, et ce dans un contexte de pénurie
de ressources. A la liste des moyens, un progiciel de type
PSA (Professional Services Automation, ou gestion automatisée
des activités de services) constitue la colonne vertébrale
opérationnelle du système d'information d'une
SSII, au même titre que l'ERP pour les entreprises
des secteurs industriels. A la clef, les bénéfices
se traduisent par une productivité accrue et parfois
aussi des millions de francs économisés. Parmi
les rares éditeurs de plates-formes PSA, le Néerlandais
Augeo
Software lance à présent la toute
dernière version de son progiciel, rebaptisé
pour l'occasion Mother5. Ernst Jilderda, son CEO, et Amélie
Faure, directeur général France et VP Europe
du Sud et de l'Ouest, expliquent les intérêts
de la démarche PSA engagée par de plus en
plus de sociétés de services.
JDNet
Solutions : Quels sont les domaines couverts par une solution
PSA comme la vôtre ?
Augeo Software : Il s'agit pour nous
de couvrir l'intégralité de la chaîne
logistique des services. Or, celle-ci commence avec la façon
de définir le projet, et englobe toutes ses étapes
comme par exemple la phase de prospection. Elle comprend
également la gestion des ressources, des dépenses
et des finances, ainsi que le traitement de la facturation
client.
Quel est le principal besoin
exprimé par les sociétés de services
en matière de gestion de projets ?
Le plus important pour une SSII est de pouvoir
gérer la combinaison de ses ressources et de ses
expertises. Car il faut que celles-ci soient disponibles
en même temps et au bon moment au cours du déroulement
d'un projet.
Les cibles peuvent différer
selon les éditeurs de solutions PSA. A qui s'adresse
Mother5 ?
Nous nous adressons à trois types
d'entités différentes : les SSII, les
départements de services informatiques de grandes
entreprises comme Axa France, ainsi que les sociétés
et divisions spécialisées dans l'ingénierie
et la R&D. Toutes ces organisations présentent
des besoins similaires en matière de combinaison
de ressources sur les projets.
Et
pas les agences web ?
A l'inverse des SSII, qui représentent
une catégorie à part entière avec les
cabinets de conseil, les agences web figurent plutôt
au même titre que les éditeurs de logiciels
dans les sociétés d'ingénierie et de
R&D. Ces deux derniers types d'acteurs sont confrontés
au développement d'applications avec un délivrable
fonctionnel. Mais la raison pour laquelle nous n'avons pas
défini un groupe spécifique pour les agences
web vient aussi du fait qu'aujourd'hui, nous nous adressons
plutôt aux entreprises de taille moyenne ou importante.
Or, les agences web sont souvent de petites unités.
Dans nos clients en R&D figure par exemple Daimler Chrysler,
et en infogérance interne nous travaillons notamment
avec les groupes Axa et Carrefour. Enfin, côté
SSII, nous pouvons citer Stellar Group.
Les grands départements informatiques d'entreprises
représentent un peu moins de 50 % de nos ventes.
Ensuite, le secteur des SSII est très important pour
nous, et nous avons choisi de nous orienter vers les grandes
structures. Enfin, la recherche et le développement
constituent une part moindre de nos affaires, mais nous
avons la volonté de nous développer sur ce
secteur.
Pouvez-vous
nous citer l'exemple d'une implémentation originale,
voire inattendue, de votre progiciel ?
Il est vrai que nous ciblons toutes les activités
de services intégrant des ressources expertes et
critiques. Dans ce cadre très large, nous avons notamment
fourni Intelligent Planner (l'ancien nom de Mother5) aux
archéologues de l'Afan. Tout en étant loin
d'un cabinet de conseil, ils tombent exactement dans notre
cible. Dans les faits, c'est le spécialiste de l'antiquité
qui doit intervenir lors de fouilles sur un site gréco-romain.
Il s'agit d'un exemple type d'entreprise située hors
du secteur informatique, mais pour qui le PSA apporte une
réelle valeur ajoutée.
Dans
un registre différent, que pensez-vous du nouveau
concept de SRM (Services Relationship Management) lancé
par Niku ?
PSA est le terme générique
employé pour désigner des solutions comme
la nôtre, alors que le SRM est une invention de Niku.
Or, il est important sur un marché émergent
de ne pas brouiller les cartes, et de tous s'accrocher au
terme PSA autour duquel s'organise le marché. Car
ce dernier est très porteur, et représente
l'un des plus forts potentiels pour les années à
venir. Autant l'industrie est aujourd'hui équipée
largement en ERP pour l'ensemble de la chaîne de fonctionnement,
autant les activités de services en sont très
loin. Il n'y a donc pas d'intérêt pour le marché
qu'un éditeur s'appuie sur ses propres acronymes.
En ce qui nous concerne, nous avons préféré
jouer la carte de la créativité quant au nom
de notre produit, qui ne s'appelle désormais plus
Intelligent Planner mais Mother5.
Ne
s'agit-il pas plutôt d'une distinction opérée
entre les sociétés de services qui adoptent
un mode projet et celles qui se focalisent sur les processus
?
Nous pensons qu'aujourd'hui les cibles des
logiciels PSA sont effectivement toutes les activités
de services qui gèrent des projets. Et il existe
beaucoup de projets sur lesquels les SSII doivent mutualiser
les compétences, mais dans une logique de gestion
de flux. Or, nous décrivons tout le flux dans Mother5.
Nous partons de l'identification d'une opportunité
de business, et en fonction du projet à dérouler
dans les 6 prochains mois, nous définissons
le plan d'embauche et ce qu'il faut externaliser. Le responsable
peut anticiper au maximum ce qu'il faut faire, ou ne pas
faire, et quel type de prestations doivent être externalisées.
Et tout ceci dans la perspective des flux... Mother apporte
une véritable valeur ajoutée car il est capable,
avec son moteur de règles, de trouver la meilleure
ressource pour la meilleure tâche au meilleur moment.
Et si la productivité augmente ne serait-ce que de
5 %, le retour sur investissement tourne autour de
trois mois sur une solution comme la nôtre.
En plus de cela, nous sommes capables de tirer d'un projet
des modèles, ou des "best practices", et
de mieux les réutiliser la fois suivante, toujours
dans une logique de flux. A la base, la société
gère ses ressources, et c'est l'optimisation de leur
utilisation qui va décider si elle est profitable
ou non. Or, le vent actuel du marché fait que les
entreprises passent d'un modèle d'hypercroissance
à une rentabilité plus marquée, ce
qui est favorable à une solution comme la nôtre.
Certains
analystes ont évoqué 90 % d'échec
dans la mise en oeuvre des projets ayant trait à
la gestion des connaissances. Or, ne s'agit-il pas d'une
composante importante du PSA ? Et quelles solutions apporter
?
Il existe une différence fondamentale
entre le Knowledge Management (gestion des connaissances)
et le PSA. Nous utilisons les connaissances de l'individu
pour des tâches concrètes, qui consistent à
allouer la bonne personne au bon moment sur un projet. Cela
nous permet de rester focalisé sur le logiciel et
d'en faire un outil stratégique pour l'entreprise,
chargé du pilotage de tout leur coeur de business.
De fait, le facteur d'échec est fort au niveau du
KM
mais pas du PSA, qui gère le coeur du business.
Par ailleurs, la difficulté du PSA vient du fait
que celui-ci fait intervenir en grand nombre de ressources
différentes comprenant aussi bien les décideurs
que les personnes sur le terrain. Or, il est bien connu
que la méthode du bâton ne fonctionne pas,
et les SSII rencontrent une difficulté très
forte autour du concept d'empowering, qui consiste à
renforcer le rôle actif et dynamique de la ressource
sur le terrain dans l'entreprise. Tant que le collaborateur
doit effectuer des rapports sur ses activités sans
avoir de retour, l'entreprise est confrontée à
un abandon progressif de l'utilisation du logiciel sur une
longue période. D'où l'idée d'apporter
autant d'informations à la personne qu'elle en apporte
à l'entreprise.
Pour illustrer cette réponse, prenons le cas concrêt
d'un expert des technologies Cobol, Java et C++. Son affectation
sera opérée selon ces informations. Mais si
celui-ci a la possibilité d'exprimer qu'il dispose
des compétences Cobol mais préfère
programmer en Java, il peut le déclarer. Et d'une
ressource passive d'où l'entreprise tire les informations
par la force, il devient une ressource active qui devient
force de proposition. Et nous permettons cela dans Mother5.
Pour
terminer, qu'est-ce qui vous distingue le plus de la concurrence
?
Nous sommes européens, et tous nos
concurrents sont américains et canadiens. Cela représente
une différence importante en terme de base installée.
Augeo Software est née de la fusion entre deux sociétés,
en France et au Pays-Bas, qui ont fusionné en 1998.
De cela naît une différence fondamentale, car
il n'existe pas d'autre solution PSA avec plus de 48 000 utilisateurs
dans tous les pays d'Europe.
Ensuite, les besoins des entreprises françaises et
américaines ne sont culturellement pas les mêmes.
Par exemple, Niku est né sur le marché des
consultants indépendants, de petites structures très
présentes aux Etats-Unis qui avaient besoin de planifier
leurs activités sur le web dans un territoire immense,
avec des besoins très limités en terme de
gestion de projets. Du coup, nous avons chacun orienté
nos fonctions sur des zones différentes.
Aujourd'hui, lorsque nous regardons les différentes
solutions PSA, les acteurs américains restent faiblement
présents en Europe et inversement. Et en ce qui nous
concerne, les Etats-Unis représentent une faible
part de notre activité, que nous voulons à
présent augmenter en terme de revenus.
Avant de rejoindre Augeo, Ernst Jilderda a travaillé
pendant plus de 15 ans dans le secteur des technologies
de l'information. De 1993 à 1996, il occupe notamment avec
succès le poste de directeur Pays-Bas et président
Europe chez l'éditeur de progiciels de gestion intégrés
Baan. Puis, il crée sa propre société Erning Management
& Consultancy, spécialisée en "management training"
et investissements informels. Fin 1998, ces activités se
trouvent transférées
au sein de Stirr IT up, une joint venture entre Max ten
Dam et Rinus den Bos, les fondateurs de Usoft.
De son côté, Amélie Faure a d'abord
exercé différentes responsabilités au sein de sociétés
de services spécialisées dans l'édition de progiciels, telles
que Cap Sogeti Systems ou Syseca. Par la suite, elle participe
à la création de GénériX qui développe des progiciels
de gestion commerciale, logistique et financière. D'abord
responsable de l'agence parisienne, elle y occupe le poste
de directrice du marketing et des ventes de 1994 à 1999.
Côté formation, elle est titulaire du diplôme
d'ingénieur de l'Institut National d'Agronomie de Paris-Grignon.
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