24/04/01
"On
ne peut pas continuer sur un modèle gratuit"
Pionnier
des technologies de streaming, la société
Real
Networks a été fondée en 1994 sous
le nom Progressive Networks, abandonné un an plus
tard environ. Aujourd'hui, son leadership demeure malgré
la présence sur le marché d'Apple et surtout
de Microsoft, dont les technologies Windows Media tentent
depuis peu de s'imposer (voir interview
JDNet Solutions de Xavier Bringue). Avec la version 8 de
ses players vidéo et audio gratuits lancée
fin 2000, Real revendique 200 millions d'utilisateurs à
travers le monde. Désormais, la société
compte sur ses logiciels serveurs RealSystem IQ et ses contenus
localisés pour continuer de convaincre fournisseurs
de services et utilisateurs. Avec l'arrivée des hauts
débits, Real Networks exprime un seul mot d'ordre :
valoriser les contenus.
JDNet
Solutions : Face aux offensives de la concurrence, ne craignez-vous
pas que les technologies Real perdent la place qui était
la leur dans l'univers du streaming ?
Lionel Cosmano : Real est l'inventeur du
streaming. Les versions de nos players se sont succédées
juqu'à parvenir à l'apport récent de
l'interactivité, grâce au Rich Media, avec
synchronisation des contenus. Aujourd'hui Real Player est
la deuxième application la plus utilisée au
monde... après Internet Explorer. 200 millions de
ces players sont actuellement utilisés sur la planète
et nous enregistrons un rythme quotidien de l'ordre de 200 000
téléchargements ou mises à jour. Nous
sommes fiers de ces chiffres parce que nos plug-in ne sont
pas présents dans les configurations de base des
navigateurs. Ils doivent être téléchargés,
après saisie d'un formulaire qui permet éventuellement
de s'inscrire à une newsletter. Nous pouvons ainsi
nous adresser directement à une partie de ces 200
millions d'internautes. Nous capitalisons là-dessus
et sur le fait que notre player, devenu un véritable
navigateur, rend possible l'accès à un contenu
localisé à travers nos portails, de véritables
vitrines pour les contenus Real. Notre portail français,
par exemple, totalise un million de pages vues par mois.
Les technologies QuickTime et
surtout Windows Media n'apportent-elles pas les mêmes
résultats à Apple ou Microsoft ?
Aux Etats-Unis, 52% des internautes sont
équipés de Real Player uniquement. Autre chiffre :
à l'échelle mondiale, 85% des sites qui diffusent
du contenu en streaming le proposent au format Real, même
si d'autres formats sont souvent proposés. Sur le
site de TF1, par exemple, le contenu est proposé
dans les formats Windows Media et Real Player mais 7 vidéos
sur 10 sont vues en Real. Nous disposons des technologies
d'encodage les plus performantes et nous offrons la seule
solution qui "stream" (diffuse, ndlr) plus de
45 formats... dont QuickTime. Notre position de leader ne
semble donc pas menacée.
Les logiciels serveurs de streaming
Microsoft sont installés en standard, comme de simples
briques, au sein de Windows 2000. Comment Real peut-il rivaliser
dans ces conditions ?
Notre plate-forme RealSystem IQ permet de
s'affranchir des obstacles à la diffusion des contenus
en streaming. Ces serveurs s'installent sur les réseaux
CDN (Content Delivery Networks) tels que ceux de Madge Web,
France Télécom ou Akamaï et en font des
réseaux "intelligents". Ils ne fonctionnent
plus selon le modèle serveur maître/serveur
esclave mais reposent sur une totale interdépendance
des serveurs. Il n'y a aucune contrainte de système
d'exploitation puisque nos serveurs de streaming fonctionnent
sous NT, UNIX, Linux ou encore Solaris et leur interopérabilité
est totale. Bien sûr ils ne sont pas gratuits. Mais
Windows 2000 n'est pas gratuit non plus. De la part
de Microsoft, le choix d'intégrer le serveur de streaming
consiste plutôt à pousser les fournisseurs
de services à adopter leurs plates-formes serveur
complètes. Et de notre côté, je rappelle
que tous nos produits sont disponibles gratuitement en téléchargement
dans leur version basique. Par exemple, notre logiciel serveur
limité à 25 connexions simultanées
permet à quiconque de diffuser du contenu en streaming.
C'est une manière pour nous de faire connaître
et de faire évaluer nos produits.
Aujourd'hui se pose de plus
en plus la question du modèle économique des
contenus multimédia en streaming. Quelle valeur ajoutée
peut représenter l'usage de vos technologies ?
Pour notre part, nous sommes un pionnier
en termes de stratégies de promotion. Nous vendons
de l'espace publicitaire sur nos players et sur les portails.
Du point de vue des fournisseurs de contenu, il est désormais
évident qu'il faut valoriser le contenu et générer
du revenu. On ne peut pas continuer sur le modèle
économique du gratuit. Nous avons lancé, aux
Etats-Unis seulement pour l'instant, le GoldPass qui donne
accès à un contenu exclusif pour un abonnement
mensuel de 9,95 dollars. Nos retransmissions d'évènements
sportifs, de contenu lié au cinéma ou de concerts
intéressent déjà de nombreux internautes.
J'ajouterai que Napster a récemment acquis une licence
de distribution payante en download ou en streaming auprès
de MusicNet, fruit d'une joint venture entre Real, AOL Time Warner
et Bertelsmann. Et avec le haut débit, beaucoup de
choses vont devenir payantes parce que la diffusion d'un
contenu de qualité coûte de l'argent...
En attendant que le haut débit
n'équipe une proportion suffisante d'internautes,
de quelle qualité devra-t-on se satisfaire ?
La version 8 de nos codecs a été
co-développée avec Intel et Sony. Pour ce
qui est de la musique, nous avons divisé par deux
les besoins en bande-passante du format mp3 : le streaming
audio en qualité CD est possible à 64 Kbits
par seconde, soit la moitié des 128 nécessaires
au format mp3. Par ailleurs, nous pouvons diffuser du contenu
audio en stéréo dès 16 Kbits par seconde,
ce qui rend l'accès possible à l'énorme
majorité des internautes encore équipés
de connexions à très bas débit. En
ce qui concerne la vidéo, le bas-débit autorise
une diffusion à 37 Kbits par seconde et les connexions
à haut débit classiques de type ADSL ou câble
bénéficient d'une qualité VHS à
partir de 220 Kbits par seconde. Une qualité proche
du format DVD peut être atteinte avec une connexion
à 500 Kbits par seconde. Mais nous constatons aussi
que le CCF, par exemple, publie sur la page d'accueil de
son site un message du président en vidéo :
25 Kbits par seconde pour une qualité satisfaisante
et un accès possible pour les plus bas débits.
A
26 ans, Lionel Cosmano a intégré RealNetworks en juin 2000.
Il a pour mission de promouvoir RealNetworks en France et
de développer sa présence sur l'Europe du Sud (Espagne et
Italie). Avant cela il a passé 5 ans chez Microsoft. Dès
1995, il intègre le département marketing PME/PMI pour ensuite
rejoindre le marketing distribution en qualité de chef de
marché. Il poursuit et finit son parcours chez Microsoft
en prenant en charge le marketing Support et Service notamment
pour le lancement et la promotion de nouveaux services de
support via Internet.
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