Le
World Wide
Web Consortium (W3C) vient de faire connaître
sa position officielle sur l'utilisation de ses standards,
six mois après sa première proposition
et le lancement d'une consulation publique sur le sujet,
le 16 août 2001. Le sujet très disputé
des licences RAND (reasonable and nondiscriminatory),
qui fondait l'essentiel des propositions de la précente
version du draft du W3C, est finalement évacuée
du débat. Le W3C a tranché en faveur d'un
système de standards libres de droits, en tout
cas pour le moment. Plusieurs sociétés
membres du consortium demandent en effet un réexamen
de ce point.
Le
W3C, un organisme de standardisation ouvert
Pour rappel, le World Wide Web, créée
en 1994, a pour vocation d'assurer l'intéropérabilité
des différentes composantes technologiques d'Internet
grâce à la promotion de normes techniques
standardisées.
A
quelques exceptions près, jusqu'à l'année
dernière, le principe qui régissait l'établissement
de ces normes prônait la gratuité de l'implémentation
des standards issus des groupe de travail de l'organisation.
Pour s'en assurer, le W3C demande d'ailleurs à
chacune des sociétés (elles sont aujourd'hui
plus de 520) qui décide de rentrer dans un groupe
de travail, de déclarer les brevets qu'elle a
déposé qui seraient susceptibles de rentrer
en conflit d'intérêt avec les travaux en
cours, et de renoncer à leur utilisation postérieure
pour réclamer des droits aux utilisateurs des
standards.
Une rupture philosophique inadmissible
?
C'est ce principe même de gratuité qui
a été remis en question en août
2001, avec la publication d'une proposition
du W3C visant à instituer le paiement de
royalties par les utilisateurs d'un standard reposant
sur une technologie brevetée par une société
privée. Une idée résumée
par le concept de RAND (reasonable
and nondiscriminatory), grâce auquel le consortium
proposait que la décision de faire payer ou non
un utilisateur, soit laissée à "la
discrétion du détenteur de la licence"
(dixit la directrice de la communication du W3C). En
d'autres termes, les grandes sociétés
informatiques qui sont à la fois les membres
les plus actifs du W3C et les principaux détenteurs
de licences technologiques du secteur, se seraient trouvées
libres de faire payer des standards techniques conçus
au départ pour profiter à tous.
Capitulation
temporaire des groupes d'influence
Devant
la levée de boucliers de plusieurs milliers de
protestataires (associations de défense des logiciels
libres en tête), le W3C dont les premiers avis
étaient attendus pour février 2002, vient
donc de faire machine arrière.
Dans la nouvelle version amendée de son règlement,
le consortium est ainsi revenu sur trois points fondamentaux.
L'option RAND est supprimée dit le communiqué
officiel; plus exactement, elle est ajournée
et devrait être remise à l'étude
dans le courant de l'année, pour n'être
plus envisagée que de façon "exceptionnelle"
(sic) précise le même communiqué.
Les participants aux différents groupes de travail
sont enjoints à "adhérer au mode
'libre' ". Le texte du W3C ne précise pas
s'il s'agit d'une obligation juridique ou d'une simple
incitation. Il fixe en revanche les modalités
de déclaration des licences pour les sociétés
membres d'un groupe de travail.
L'utilisation défensive d'un brevet est désormais
limitée dans le cas où le détenteur
du brevet "est attaqué pour violation d'un autre
brevet lors de l'implémentation d'une recommandation
W3C".
Le texte publié le 26 février 2002 ne
constitue pas cependant la version définitive
du réglement du W3C. La question du RAND notamment
n'a pas été définitivement tranchée,
et plusieurs sociétés informatiques membres
du W3C, dont le nom n'est pas cité, demandent
que le projet soit réexaminé. L'organisme
de standardisation devrait donc soumettre de nouvelles
versions dans les mois qui viennent afin de trouver
un consensus. Une version dite "dernier appel"
(last call) devrait ainsi être publiée
avant qu'une proposition de recommandation ne soit soumise
au vote des membres du W3C. En dernière instance,
ce sera au directeur du W3C de statuer sur le sort de
la recommandation définitive.
|