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Le GPRS cherche (désespérement) sa "killer application"
Selon une étude du Gartner, le GPRS ne rapportera que 50 % du chiffre d'affaires prévu. Le flop ne sera évité que dans le B to E. (Vendredi 7 juin 2002)
     

Les opérateurs de télécommunication mobile n'ont certainement pas besoin d'une mauvaise nouvelle : la plupart d'entre eux sont empêtrés dans des investissements colossaux en équipements et en licenses UMTS. Si l'on en croit deux études du Gartner Group, leurs comptes risquent de ne pas s'améliorer de si tôt : le GPRS est en train de s'engager sur une pente inquiétante. La technologie de transport de données 'haut débit' de deuxième génération pourrait même être remplacée par la troisième génération avant même d'être rentabilisée. Une nouvelle bien inquiétante, qui vient confirmer celle du démarrage en demi-teinte du GPRS.

A l'heure où les ventes de terminaux mobiles compatibles se banalisent, les abonnements au GPRS restent cloués au sol. David Deighton, vice-président Mobile Business chez Gartner Europe prend l'exemple "d'un revendeur Anglais [qui] a écoulé 30 000 terminaux, mais dont à peine 1 % des clients en question utilisent les services GPRS".

Pourquoi passer au GPRS ?
Pourquoi un tel flop ? Il y a bien sûr des arguments rassurants : les terminaux qui exploitent vraiment le GPRS
débarquent à peine sur le marché, le parc des téléphones en circulation est massivement incompatible, et nous n'en sommes encore qu'aux prémices de la deuxième génération. Mais il y a surtout deux gros points noirs : "les applications mises en avant par les opérateurs n'ont pas été correctement dimensionnées pour les débits du GPRS. Les offres que l'on devrait retrouver sur le marché s'appuient sur des débits compris entre 20 et 48 Kbits par seconde. C'est bien trop peu pour une application comme le transfert de fichiers. Ca ne suffit en réalité qu'au WAP. Pourtant, il n'y a pas de secret : une technologie ne fonctionne que si les services qu'on développe à son intention sont séduisants, et utilisables dans des conditions confortables. Ce type d'applications est encore trop rare pour permettre la deuxième génération de téléphonie mobile de séduire".

Autre défaut rédhibitoire du GPRS : son coût de facturation. David Deighton prend l'exemple d'un professionnel qui souhaiterait synchroniser Outlook depuis son terminal GPRS chaque semaine : "Imaginons qu'il ait 5 Mo de mails à rapatrier. Le Mo de mail est facturé 3 ou 4 dollars en moyenne. Ce qui met le prix d'une synchronisation à 15 euros environ ..." Sans compter que les communications sans fil sont d'une qualité assez mauvaises: elles sont beaucoup moins stables que celles du réseau filaire. Il faut donc envisager le cas où la connexion serait coupée en plein milieu de la réception des mails. "Dans ce cas là, et à supposer qu'on travaille avec Outlook, il faudrait recommencer le processus de synchronisation à zéro". De quoi dissuader les clients potentiels ...

Pas de rentabilité à terme
Les analystes du Gartner pensent que le mauvais départ du GPRS n'est pas le fait du hasard, et que les résultats décevants accumulés ces derniers temps devraient se confirmer à long terme. Dans deux rapports Européen et Etatsunien, le cabinet d'analystes avance que les prévisions les plus optimistes sont sur-évaluées de 50 %. Pour mémoire, les investissements déjà consentis par les opérateurs de téléphonie mobile se montent à 113 milliards de dollars, ce à quoi il faudra sans doute ajouter 6 à 9 milliards de dollars selon le Gartner. Une somme à mettre en rapport avec la petite vingtaine de milliards de revenus que le Gartner attend pour le GPRS dans les années les plus fastes ... En somme, le risque est grand que les opérateurs ne parviennent pas à rentabiliser leurs investissements avant la troisième génération de téléphonie mobile, qui débarquer dans les années qui viennent. A l'heure où le nombre d'abonnés entre dans une phase de croissance nulle, les conséquences financières de l'échec du GPRS pourraient être dévastatrices.

Seul ilot de calme au milieu de la tempête : le marché du B to E - entreprise vers employés. Pour Bill Clarck, directeur de la recherche au Gartner Group, le GPRS pourrait connaître quelques exemples de 'success stories' dans ce domaine : "Les entreprises pourraient comprendre que le GPRS est la meilleure technologie pour les applications basées sur des transferts d'informations très rapides". Il faut donc s'attendre à un plébiscite du GPRS pour acheminer des informations sensibles aux employés en un temps record.

Une lueur d'espoir ?
Sur le plan global, la situation est grave mais tout n'est pas perdu. Comme le souligne David Deighton, "le plus difficile à percevoir lorsque l'on crée une projection sur le long terme, c'est l'évolution des habitudes de consommation. Jusqu'à maintenant, rien n'indique que le GPRS sera porté par une "killer application". Tout indique plutôt que la technologie va être boudée par le grand public. Mais il suffit qu'une mode soit lancée, un peu comme celle des SMS - qui se sont imposés spontanément et sans grande campagne de marketing - pour que nos prévisions se révèlent inexactes. Il peut se passer beaucoup de choses en 3 ou 4 ans". Peut-on espérer que le GRPS sera sauvé des eaux par une application salvatrice ? Les opérateurs ont certes ménagé une sucession aux SMS avec les EMS et MMS, qui permettent d'envoyer des textes, des images et de la musique à ses correspondants. Reste à savoir si la frange la plus jeune de la clientèle mordra à l'hameçon.

Deuxième lueur d'espoir : l'I-mode. Fort de son spectaculaire succès au Japon, la technologie de NTT DoCoMo tente de conquérir le vieux continent. Une technologie qui demande un protocole de transfert de données par paquets comme le GPRS. Le mariage du GPRS et de l'I-mode pourrait donc aider à rentabiliser les réseaux GPRS dans certains cas. Pourtant, il est impossible de savoir si l'I-mode parviendra à s'implanter en terre européenne. Celà dépendra notamment du coût de facturation du service, qui est extrêmement bas au Japon, du succès en Europe des applications qui font fureur sur l'archipel Nippon, de la disponibilité de terminaux mobiles compatibles, etc ... Bouygues Telecom parviendra-t-il à porter le succès de l'I-mode en France sur ses seules épaules ? Difficile à déterminer aujourd'hui. Le risque de ne pas atteindre la masse critique demeure donc très élevé pour le GPRS.

Pour David Deighton "les opérateurs de télécom étaient sans doute conscients des dangers que comportaient leurs investissements, et ce dès le début. Mais lorsque leurs concurrents se lançaient dans l'aventure, pouvaient-ils se permettre de faire l'impasse sur le GPRS ?". Un comportement moutonnier qui pourrait bien coûter cher aux opérateurs les plus fragiles.

[Nicolas Six, JDNet]
 
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