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Acteurs |
WorldCom
au bord du gouffre |
Worldcom rejoint Enron dans le cercle des entreprises maudites. La survie de l'opérateur large bande est bel et bien menacée. Et la confiance des analystes financiers ébranlée. (Jeudi 27 juin 2002) |
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Les
grands opérateurs télécoms dans la tourmente
Coup de massue sur le secteur
des télécoms. Scott Sullivan, le directeur
financier de WorldCom a menti comme un arracheur de dents :
il a maquillé une partie des dépenses du
groupe pour qu'elles n'apparaissent pas dans le bilan
comptable de Wordcom. Le chiffre des sommes dissimulées
est astronomique : 3,8 milliards de dollars. Le scandale
risque donc d'entraîner dans son sillage l'un des
plus grands symboles mondiaux des télécommunications,
un opérateur large-bande qui dessert pas moins
de 20 millions de clients finaux, une compagnie qui emploie
80 000 employés.
Coup
de tonnerre
La déception est à
la mesure du scandale : immense. "C'est du jamais
vu - confirme Laurent Balcon, analyste financier
telecom chez Global Equities. Le trucage financier est
d'une malhonnêteté déconcertante.
C'est un mensonge effronté, qui n'a rien de la
complexité du montage financier d'Enron :
la manipulation est aussi simple que directe".
Laurent
Balcon s'était comme tout le monde laissé
flouer par le bilan de Worlcom, il avait même soutenu
dans un article
du JDN que les fondamentaux de l'opérateur étaient
corrects.
Et d'ajouter "On
a la sensation de s'être fait profondément
avoir". C'est un peu le sentiment qui prime partout
dans le secteur. Andersen, qui était chargée
de la certification des comptes de WorldCom, n'a elle
même rien vu passer. Scott Sullivan est parvenu
à flouer tout le monde, et le monde de la finance
se réveille groggy.
Le
spectre de la faillite
Dans ces conditions, on s'achemine
probablement vers une faillite pure et simple : "Comment
faire confiance à un opérateur qui a trahi
toutes les règles élémentaires
de la publication des comptes ? Comment une banque
pourrait-elle accorder la moindre ligne de crédit
à ce qu'il faut bien appeler un voleur ?"
Les banques réfléchiront à deux fois
avant de soutenir Worldcom, et les clients eux même
pourraient bien prendre leurs distances avec l'opérateur
parjure. Sans le soutien des banques, et avec un carnet
de clients qui fond comme neige au soleil, Wordcom aura
donc du mal à affronter sa nouvelle - et calamiteuse -
situation financière.
Car Wordcom est déficitaire, en dépit de
ce que Scott Sullivan a voulu faire croire. Les comptes
truqués reportaient en effet un bénéfice
de 1,4 milliards de dollars pour 2001 et de 130 millions
pour le premier trimestre 2002. Sans l'artifice comptable,
Worlcom déclare qu'il aurait perdu de
l'argent en 2001 comme
en 2002. Des performances inquiétantes pour une
compagnie qui a 30 milliards de dollars de dettes, et
dont le réseau de fibres optiques est notoirement
sous-employé. Wordcom est donc au bord du gouffre,
et la justice américaine se tient juste derrière
lui, sans doute prête à faire un exemple
pour que de pareils tours de passe-passe ne se reproduisent
plus.
Wordcom
peut-il se relever ?
Face à une telle crise, comment l'opérateur
pourait-il encore se relever ? C'est probablement
la question que se pose le conseil d'administration de
l'opérateur large bande, dont le CEO a été
fraîchement nommé. La nouvelle équipe
dirigeante hérite en effet d'une situation qu'elle
n'a pas voulu, et qui s'est probablement décidée
en comité restreint au sommet de la précédente
équipe dirigente. Pour preuve : la SEC semble
s'intéresser de très près au rôle
de M.Ebbers, l'ancien CEO et fondateur de Worldcom.
Le nouveau conseil
d'aministration a donc réagi comme il se doit en
mettant à la porte Scott Sullivan, le fameux directeur
financier parjure qui peut craindre pour sa
liberté. Il a aussi annoncé des mesures
pour se ménager un fonds de roulement qui lui permette
de poursuivre ses activités. C'est en effet cette
préoccupation qui a conduit le géant à
annoncer le licenciement massif de 17 000 employés,
et les coupes claires qui affecteront son budget de fonctionnement.
On peut douter que ces mesures énergiques suffisent :
la santé
du marché des backbones est désastreuse,
et Wordcom a perdu la confiance de ses banques et de ses
clients. A suivre ...
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