Il y a plus de deux siècles,
Adam Smith soulignait le rôle du travail collaboratif
dans un fameux texte sur la "fabrique d'épingles" :
dix ouvriers travaillant chacun de leur côté
ne parviennent pas à produire plus de 20 épingles
par jour et par ouvrier. S'ils se spécialisent
chacun dans une étape de la fabrication, les cadences
montent à 4 800 épingles par ouvrier
et par jour.
Problématique
antédiluvienne
C'est là le principe même de la division
du travail, "une problématique vieille comme
le monde, et d'où découle en ligne directe
la nécessité d'organiser
les interactions entre les employés, de les faire
collaborer et coopérer", confirme
Serge Levan, consultant en management et en technologies
du travail collaboratif chez Main Consultants. Toutes
les entreprises de plus d'une personne font nécessairement
du collaboratif, même si elles n'en ont pas toujours
conscience.
L'entreprise
a bien changé depuis l'époque où
Adam Smith consignait par écrit ses observations :
ce ne sont plus des épingles mais des informations
qui circulent entre les salariés. "Les échanges
se sont dématérialisés, et ils
gagnent régulièrement en complexité",
explique Serge Levan. Mais rien n'a changé du
côté des décideurs : leur métier
consiste toujours à améliorer la collaboration
au sein de leurs équipes - en sus des décisions
stratégiques. Depuis le début des années
1990, l'informatique est venue leur prêter main
forte.
La
révolution informatique ?
"Tout a commencé avec l'apparation de Lotus
Notes à la fin des années 1980",
explique Laurent Binard, PDG de Mediapps, et employé
de Lotus à l'époque. "On doit le
concept de TCAO (travail collaboratif assisté
par ordinateur) à Ray Ozzie, un véritable
visionnaire", qui est passé récemment
dans les rangs de Microsoft. Aujourd'hui, toutes les
entreprises - ou presque - utilisent des outils
de TCAO. Certaines se contentent d'améliorer
leur communication grâce à l'email, d'autres
vont beaucoup plus loin en confiant la supervision et
la coordination de leurs projets à un ordinateur.
Le travail collaboratif
assisté par ordinateur rassemble une galaxie
d'outils plus ou moins efficaces : tout au long
de ce dossier, nous allons faire la distinction entre
les produits utiles et ceux qui sont superflus. Mais
avant de rentrer dans le vif du sujet, un petit arrêt
par la case "typologie" s'impose, afin de
donner une vision plus claire des quatre grandes familles
d'outils de TCAO :
> Les outils de communication
de base.
Leur rôle est avant tout de faire circuler
une information entre deux collègues. C'est l'outil
"de première nécessité"
d'après Serge Levan : les outils des trois
autres familles répondent à un besoin
plus particulier, même s'ils incorporent nécessairement
des fonctions de communication. On dit que ces outils
sont coopératifs : les deux employés
qui communiquent avec cet outil n'ont pas toujours le
sentiment de travailler dans un même but. On recense :
-
Le mail
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-
Le chat
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-
Le tableau blanc
|
-
La visio-conférence |
-
L'Instant Messaging |
> Les outils de
travail partagé
Ils permettent à plusieurs personnes de
travailler sur un même document ou sur une même
application. (Le traitement de texte Word possède
par exemple un outil qui permet d'annoter un texte pour
proposer des corrections). Ce sont des outils de collaboration,
puisque les différentes personnes qui les utilisent
ont le sentiment d'avancer vers un but commun. Ces outils
sont relativement peu employés. Leur utilisateurs
sont souvent de grosses entreprises, mais de petites
structures - comme les cabinets d'avocats -
peuvent aussi y trouver un intérêt. On
recense :
-
Le partage d'applications (exemple : plusieurs
personnes travaillent sur le même plan de
la future voiture d'un constructeur automobile)
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-
L'édition partagée
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-
Les forums et outils apparentés
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> Les outils d'accès
au savoir - ou de Knowledge Management
Si un employé a fait l'effort de créer
un document, ou de développer une expertise,
il peut faire gagner beaucoup de temps à ses
collègues : pourquoi créer plusieurs
fois le même document - ou développer
plusieurs fois la même expertise - lorsqu'on
peut les trouver ailleurs dans l'entreprise ? Il
faut donc faire en sorte que tous les employés
puissent accéder à ces informations. Les
entreprises qui y ont recours sont souvent les grosses
PME et les grands comptes. On recense :
-
Les bibliothèques
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Les outils de peer to peer
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-
Les portails
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-
La cartographie des compétences |
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Les annuaires électroniques |
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Les listes de diffusion |
-
Les FAQ |
-
Les WiKi (sortes de portails qui s'enrichissent
grâce à la contribution des personnes
qui les consultent) |
-
Les moteurs de recherche
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> Les outils de workflow
Ce sont sans doute les outils les plus spectaculaires.
"L'intervention du logiciel ne se situe plus au
niveau de l'information, de la communication ou de la
collaboration, mais au niveau supérieur de la
coordination", précise Serge Levan
(1). Les workflows assistent le
chef de projet dans le suivi de son projet, et permettent
de contrôler et d'accélérer les
interactions entre les contributeurs, les relecteurs
et la personne chargée de la validation. Ces
outils sont surtout utilisés par les grands comptes.
On recense :
-
Les outils de synchronisation
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Les outils de gestion des tâches
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-
Les agendas partagés
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Le deuxième article
de ce dossier est une interview,
celle de Stephen Brown, associé de KPMG Consulting
spécialisé notamment dans l'organisation
de l'entreprise. Son opinion - très personnelle
- est éclairante sur l'efficacité réelle
des outils de travail collaboratif assisté par
ordinateur.
(1)
Serge Levan est l'auteur d'un livre intitulé
Le Projet Workflow paru en 1999 chez Eyrolles.
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