S'engager dans l'interconnection
de son SCM (Supply Chain Management - outil de
gestion de la chaîne logistique) à celui
de ses partenaires - clients et fournisseurs -
est une aventure en bonne et due forme, qui demande beaucoup
de compétences et sans doute une volonté
forgée dans l'acier.
Ce projet n'est en effet
pas à mettre en toutes les mains : "Oui,
les DSI ont raison de penser que les grands chantiers
d'interfaçage entre plusieurs SCM sont des casse-tête,
et que beaucoup de leurs concurrents refusent de s'y
aventurer - rappelle Michel Rousseau, consultant
SCM indépendant. Assurément, il est plus
facile d'implémenter un ERP que de se lancer
dans une telle aventure."
Deux
nouveaux concepts émergent des projets déjà
menés
Pourtant,
force est de constater que certaines entreprises ont
relevé le gant : on a vu naître des
projets de grande envergure, qui connectent les géants
de l'industrie avec leurs réseaux de sous-traitants,
et bien d'autres projets phares.
Ce qui laisserait à
penser que, comme l'avance Michel Rousseau, "le
ROI est bel bien au rendez-vous" dans certains
cas au moins. Une bonne raison d'observer ce qui se
fait chez les défricheurs, et peut-être
de prendre son courage à deux mains.
En matière
d'interconnection logistique, deux nouveaux concepts
sont apparus à la pointe du mouvement :
la mutualisation des approvisionnements, puis les portails
interentreprises. Deux approches logistiques particulièrement
novatrices, et qui auraient difficilement pu voir le
jour hors l'informatique.
Des
économies sensibles avec la logistique partagée
La mutualisation des approvisionnements
rapproche ainsi de façon spectaculaire des partenaires
habituellement éloignés : l'entreprise,
ses clients, ses fournisseurs lointains, et... ses concurrents.
Cette approche tourne autour de deux grands axes :
la prévision partagée, et la logistique
partagée.
Passons rapidement sur
la mutualisation des prévisions : elle permet
à toute la chaîne logistique de gagner
en réactivité, depuis le fournisseur de
matières premières jusqu'au client final -
en passant par moults intermédiaires.
Le secret ? Donner
à chaque founrnisseur la possibilité d'anticiper
la demande à venir, en lui donnant accès
aux historiques de ventes - et autres prévisions
de ventes - de l'entreprise. Un procédé
qui permet de raccourcir les rotations de stock de façon
substantielle.
La logistique partagée
est sans doute la plus suprenante : "de très
grandes entreprises ont contacté leurs concurrents
directs, et ont décidé ensemble d'adopter
le même transporteur pour acheminer leurs produits
chez le client, ou se faire livrer leurs approvisionnements"
explique Michel Rousseau. Certaines
industries on même été jusqu'à
regrouper leurs achats dans une même place de
marché virtuelle : "de grandes chaînes
concurrentes y recourent et en sont très satisfaites".
Les
économies générées sont
assez sensibles : "camions, locaux, temps
de rotation du stock" énumère Cécile
Colonna d'Istria, comissaire du salon SCM Progilog -
qui se tiendra au CNIT de La Défense les 27 et
28 novembre 2002. "Wal-Mart et Sara Lee ont travaillé
ensemble sur les prévisions de vente d'un certain
nombre d'articles, et ils ont agi sur la base de leurs
résultats conjoints. Résultat : 2%
de niveau de stock en moins dans les linéaires,
14 % de stock en moins dans les magasins, et une
rotation des stocks améliorée de 18 %.
Tout celà avec une augmentation des ventes proche
de 40 %". Un exemple édifiant.
De l'importance
de l'informatique.
Attention :
ce type de projet est réservé aux très
grands comptes, et à de très rares entreprises
de taille moyenne. Outre la connection des SCM, il faudra
partager des informations stratégiques avec ses
concurrents, ou au moins avec un transporteur commun.
Quel types de données ? Le volume des commandes
pour les semaines à venir par exemple.
Un problème qui n'est pas vraiment gênant
pour Michel Rousseau : "A chaque fois que
ces données passent une porte de sortie, elles
sont raffinées pour ne garder que ce qui concerne
le partenaire. Qui plus est, les fournisseurs témoignent
tous d'une éthique forte, ils respectent les
contrats dans lesquels il est clairement spécifié
que les infos ne sauraient en aucun cas fuir" -
sauf si elles sont répliquées discrètement,
serait-on tenter d'ajouter.
Que vient faire l'informatique
dans tout ca ? Sans elle, la tache serait singulièrement
complexifiée, voire impossible. "Les échanges
de données empruntent désormais la voie
IP, un canal qui fluidifie et qui accélère
les flux. L'extraction des données est confiée
à des outils de pertinence, extrêmement
secourables. Qui
plus est, les places de marché informatisées
permettent d'effectuer facilement des comparaisons"
explique Michel Rousseau. Un socle incontournable pour
qui décide d'ouvrir résolument son SCM
sur l'extérieur. Un passage obligé lorsque
l'on souhaite accélérer ses processus.
Et c'est là que
les portails interentreprises font leur entrée
en scène : leur but est de donner accès
aux bonnes informations à un maximum de partenaires,
moyennant un minimum d'efforts. "Faute
de temps ou d'argent, les entreprises sont souvent amenées
à refuser l'interfaçage de leur SCM à
celui d'un partenaire - ou plus simplement à
lui refuser les informations dont il a besoin pour optimiser
sa chaîne" - explique Michel Rousseau.
La solution ? Développer
un petit portail Extranet sur lequel chaque partenaire
viendra puiser les informations qui lui sont nécessaires -
et seulement celles-là. Un outil qui coûte
évidemment moins cher qu'un gros travail d'EAI,
et qui permet d'ouvrir les portes de la connaissance
de sa chaîne logistique aux plus petits partenaires.
Une idée qui va dans le sens du vent...
|