Les cabinets d'études
n'ont pas accordé leurs violons avant d'entonner
à trois la sérénade du TCO :
pour IDC, le coût total de possession de
Linux est supérieur à celui de Windows 2000.
Pour Cybersource et son confrère Robert
Frances Group, c'est le contraire. Et pour les observateurs,
c'est le désarroi : comment dans ces conditions
séparer le bon grain de l'ivraie ?
Les
chiffres : pour IDC, Linux est dans trois domaines
sur quatre plus cher que Windows, le surcoût allant
de 11 à 22 %. Windows est plus avantageux
pour piloter une infrastructure de réseau, centraliser
et gérer les impressions, et gérer la
sécurité du SI. Linux tire tout de même
son épingle du jeu dans le domaine des serveurs
Web, où il est 6 % moins cher que Windows.
Pour
le Robert Frances Group au contraire, Linux revient
globalement deux fois moins cher que Windows -
toutes applications comprises. Pour Cybersource enfin,
Linux est 25 % moins cher que Windows, toutes
applications
comprises. Chacune de ces études prenant en compte
l'acquisition des matériels et des licences,
les coûts d'implémentation, d'adminstration
et de support. Si bien qu'au final, on ne sait plus
à quel saint se vouer.
Le jeu
des trois cabinets
Faut-il faire confiance au cabinet le plus réputé,
en l'occurence IDC ?
Sans doute, sauf dans une situation exceptionnelle.
Et c'est dans ce dernier cas que l'on se trouve. En
effet, l'étude d'IDC a été financée
par Microsoft. Une situation un brin incestueuse qui -
en dépit de la réputation de sérieux
dont jouit IDC - ne manquera pas de semer le trouble
dans les esprits. Précisons également
que l'étude de Robert Frances Group a été
financée par IBM.
Faut-il donc se replier
sur la comparaison des méthodologies des trois
études ? On tient ici une clé intéressante :
les trois cabinets n'ont pas procédé de
la même façon. IDC a interrogé une
centaine de grandes entreprises en séparant
quatre catégories de produits, et il a étalé
ses calculs sur une période de cinq ans. Robert
Frances Group a interrogé un échantillon
de 14 grandes entreprises, en étalant ses calculs
sur une période de trois ans. A l'inverse d'IDC,
Robert Frances Group n'a pas segmenté les applications
Linux en plusieurs familles. Les données du cabinet
sont donc infléchies par le poids de l'existant :
elles évaluent majoritairement le TCO de serveurs
Web.
Cybersource, quant à
lui, a opté pour une démarche radicalement
différente : le cabinet a construit un modèle
mathématique basé sur un cas d'école
simulant l'utilisation de plusieurs serveurs Linux dans
une PME, et sur une période de trois ans.
Des
incertitudes demeurent
Les enseignements qu'il faut en retirer sont les suivants :
la méthodologie de l'étude d'IDC est la
plus sérieuse, et son panel représente
le meilleur échantillon in vivo. Mais
elle souffre - comme toutes les autres - d'un
problème de localisation : le coût
d'un spécialiste de Linux est-il plus élevé
aux Etats-Unis ou en France ? Deuxième limite :
elle met l'accent sur les grandes entreprises, à
l'extrême opposé de Cybersource. Ce qui
n'est pas anodin comme nous le verrons plus loin.
Troisième limite :
l'étude d'IDC se focalise sur une échelle
de temps fixe, qui correspondra peu souvent à
la réalité sur le terrain. Robert Frances
Group met - à raison - l'accent sur
les coûts cachés qui pourraient faire flancher
les calculs de TCO les plus fins. Dans le cas où
une entreprise voudrait faire monter ses serveurs en
charge, Linux se montrerait par exemple beaucoup plus
souple que Windows. En somme, IDC a fait l'évaluation
d'un cas particulier. Et pas plus que les autres, le
cabinet ne peut prétendre répondre à
la question générale Linux est-il moins
cher que Windows ?
Mais toutes les informations
issues de ces études ne sont pas caduques. Pour
éclaircir ce tableau fort obscur, nous avons
jugé utile de présenter ci-après
les conclusions saillantes de ces études. Par
souci d'objectivité, nous avons fait en sorte
de séparer les questions qui restent en suspens
de celles auxquelles il est possible de répondre.
Ce que l'on sait |
Ce
que l'on ne sait pas |
- Les deux OS se
tiennent dans un mouchoir de poche.
Selon toute vraissemblance, aucun
des deux systèmes d'exploitation ne creuse
un écart de TCO rédhibitoire par
rapport à l'autre. Linux n'est donc pas
largement moins cher que Windows. La raison est
la suivante : le TCO d'une licence est conditionné
par ses coûts de maintenance et d'administration
plus que par ses coûts d'acquisition.
- Plus l'entreprise
est petite, plus Linux est intéressant.
L'étude d'IDC n'a pris en
compte que les grosses entreprises, dans lesquelles
le télédéploiement et la
télémaintenance sont très
coûteux, et donc stratégiques. Ce
qui est moins vrai dans les petites entreprises.
- Linux est moins
cher pour les serveurs Web.
Les trois cabinets
d'études s'accordent sur ce point. Le TCO
de Linux est au minimum 4 % meilleur que
celui de Windows, et au mieux 100 % meilleur.
- Les compétences
Linux sont plus chères que les compétences
Windows
IDC
souligne le coût supérieur des compétences
Linux par rapport aux compétences Windows.
Robert Francis Group modère les chiffres
donnés par IDC, mais souligne qu'un administrateur
Linux coûte légèrement plus
cher qu'un administrateur Windows. Ce n'est toutefois
qu'un élement de jugement parcellaire.
- Linux souffre
d'une pénurie d'outils de maintenance et
d'administration.
L'argument d'IDC paraît irréfutable.
Cependant, le cabinet d'analyse souligne que cette
faiblesse n'est que temporaire, et qu'elle devrait
se résorber progressivement : plusieurs
éditeurs s'engouffrent actuellement dans
le brèche.
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- Windows est-il
moins cher que Linux ?
Question à laquelle aucune
étude actuelle ne peut répondre
de façon exhaustive. Il faudrait pour cela
recourir à un protocole de recherches plus
ambitieux, qui permettrait sans doute à
chaque entreprise de se retrouver dans les chiffres
finaux. Dans le cas présent, seuls certains
DSI pourront lire ces études avec intérêt.
Pour
finir, il faudrait que l'étude soit réalisée
dans un contexte d'indépendance complète
et indubitable.
- Windows est-il
moins cher que Linux, au delà du TCO ?
S'il était avéré
que le TCO de Windows était meilleur, cela
ne voudrait pas dire que Windows serait plus intéressant
que Linux pour un DSI. Le TCO de la suite bureatique
Microsoft Works est sans doute moins lourd que
celui de la suite Office. Mais les deux produits
sont différents, et les services apportés
par la suite Office sont donc plus riches pour
l'entreprise. Pour bien faire, il faudrait donc
savoir lequel des deux systèmes d'exploitation
est le plus performant, au delà du TCO.
- Windows est-il
moins cher que Linux, dans votre cas précis ?
Les études présentent
couramment le travers de lisser la réalité.
Et pour cause : dans certains cas, Linux
reste bien plus intéressant que Windows,
et vis versa. Si le serveur que vous souhaitez
installer est beaucoup plus performant dans sa
version Linux, que vous disposez de bonnes compétences
Linux en interne, et que l'application est réputée
pour ne jamais planter, toutes les conditions
sont réunies pour que Linux soit plus intéressant
que Windows. Si au contraire l'application Linux
est encore immature, et que les compétences
Linux sont difficiles à trouver dans votre
région, le TCO de Linux sera sans doute
prohibitif.
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