JURIDIQUE 
Existe-t-il des recours en cas d'interruption du service d'hébergement ?
par Valérie Sédallian
Avocat à la Cour de Paris
http://www.internet-juridique.net (06 mars 2003)
         
  Les contrats d'hébergement se caractérisent souvent par le nombre d'exclusion de responsabilité en cas d'interruption du service d'hébergement.
Les différents incidents pouvant affecter l'accessibilité du service d'hébergement sont considérés comme un risque inhérent à l'exploitation, qui découle de la nature même du réseau internet. L'hébergeur n'est tenu qu'à une obligation de moyens, c'est-à-dire à fournir ses meilleurs efforts pour assurer le service promis.
Dès lors en cas d'incident affectant le service d'hébergement pendant de nombreuses heures, voire plusieurs jours, les clients dont les contrats d'hébergement comportent de telles clauses sont-ils dépourvus de tout moyen de recours ?

La jurisprudence peut écarter les clauses limitatives ou exclusives de responsabilité qui privent d'effet l'obligation essentielle souscrite
Selon une jurisprudence bien établie, les clauses limitatives ou exclusives de responsabilité sont jugées en principe valables, sauf en cas de faute lourde ou de fraude (dol) de la partie qui invoque le bénéfice de la clause. Les clauses limitatives de responsabilité limitant l'indemnisation à un montant dérisoire sont assimilées à des clauses exclusives de responsabilité.
Une jurisprudence plus récente, dite jurisprudence "Chronopost", sanctionne également les clauses qui en raison du manquement du débiteur à une obligation essentielle du contrat ont pour effet de contredire la portée de l'engagement pris.
Dans une décision en date du 22 octobre 1996, la Cour de cassation retient que viole l'article 1131 du Code civil la Cour d'appel qui fait application d'une clause limitative de responsabilité, alors qu'en raison du manquement du débiteur à l'obligation essentielle de fiabilité et de célérité de son service de messagerie rapide, cette stipulation qui contredit la portée de l'engagement pris devait être réputée non écrite.

La Cour de cassation a eu notamment l'occasion d'appliquer cette solution à une société de maintenance informatique qui n'avait pas respecté son engagement d'intervenir en "48 heures", le prestataire justifiant sa non intervention dans le délai promis en raison du fait qu'il n'avait pu obtenir d'une autre société le matériel nécessaire à son intervention (Com. 17 juillet 2001, aff. Securinfor).

L'avantage du recours à la notion d'obligation essentielle est qu'il n'y a pas besoin de faire la démonstration d'une faute du prestataire.

Il reste que la prestation d'hébergement est une prestation complexe, dans laquelle il peut s'avérer difficile de qualifier l'obligation essentielle.
Notamment, à partir de quel taux d'indisponibilité du service d'hébergement considérera t-on qu'il y a manquement à l'obligation essentielle du contrat d'hébergement ?

Les clauses relatives à la qualité de service
Dans les affaires Chronopost et Sécurinfor évoquées ci-dessus, la notion d'obligation essentielle a pu être opposée aux prestataires parce qu'elle était rentrée dans le champ contractuel : service de messagerie rapide dans un cas, engagement d'intervenir dans un délai précis dans l'autre.

Les clauses relatives à la qualité de service ou service level agreements sont donc incontournables pour préciser les contours de l'obligation essentielle du contrat d'hébergement.

Il s'agit notamment de négocier avec le prestataire d'hébergement des engagements de disponibilité de service, à savoir la durée maximale d'indisponibilité du service au cours d'une période donnée, et de garantie de temps de rétablissement, à savoir la durée maximale d'interruption continue du service.

Les prévisions contractuelles permettent d'apprécier la réalité ou la fausseté d'une défaillance. Pour que le client puisse se plaindre qu'une de ses attentes n'a pas été satisfaite, encore faut-il que ces attentes aient été stipulées et que des performances mesurables aient été promises.

Cette appréciation suppose en préalable un contrat précis, lui même rédigé à partir d'un cahier des charges clair et complet, les contentieux sur l'étendue des obligations des prestataires naissant généralement de prévisions contractuelles insuffisantes.
L'obligation qui pèse sur le prestataire ne découle pas de la nature du contrat d'hébergement, mais de la définition du contenu des obligations prises en charge.

Définir des moyens dont on puisse objectivement vérifier la mise en place
Même si l'obligation du fournisseur d'hébergement est qualifiée d'obligation de moyens, il est toujours possible de prévoir des moyens dont on pourra vérifier la mise en place, et sur lesquels il sera possible de prévoir des engagements de résultat.

On rappellera que celui qui n'est tenu que d'une simple obligation de moyens n'engagera sa responsabilité que dans la mesure où sa faute, ayant consisté à ne pas fournir les meilleurs moyens, aura été démontrée, tandis que le débiteur d'une obligation de résultat devra réparation dès l'instant que le résultat escompté n'aura pas été obtenu. Si le prestataire doit être tenu d'une obligation de moyens, le créancier de celle-ci ne recevra de dommages-intérêts qu'autant qu'il démontrera la faute du premier; en revanche, si l'engagement doit être considéré comme de résultat, au cas où ce résultat ne se produit pas, le prestataire est responsable, sauf pour lui à démontrer à son tour l'existence d'une cause étrangère, force majeure, fait d'un tiers ou de la victime.

Ainsi, en matière de sécurité du service d'hébergement, il est difficile de prévoir un engagement de résultat général sur la sécurité.

Il est possible en revanche de prévoir des obligations positives et contrôlables à la charge du prestataire, par exemple la description des procédures d'alerte et des procédures d'exploitation, une surveillance par un technicien d'astreinte 7 jours/7, la mise en place des correctifs proposés par les éditeurs des logiciels et systèmes utilisés dans un certain délai, etc…

Si les moyens décrits dans le contrat ne pas effectivement mis en œuvre, il devient plus facile d'engager la responsabilité du prestataire en cas de défaillance.

 

 
 Valérie Sédallian
 
 

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