Imaginons qu'un collaborateur
souhaite comprendre le concept de knowledge management.
Son premier réflexe sera probablement de se munir
de documentations sur le sujet : études, livres
blancs, ouvrages, etc. Il va lui falloir de nombreuses
heures de lectures avant de pouvoir commencer à
comprendre ce qui se cache derrière ce concept.
Pourtant s'il avait eu immédiatement le réflexe
de faire appel à un expert du domaine, il aurait
économisé du temps pour comprendre de
quoi il en retournait. Echanger avec des personnes compétentes
dans le domaine visé est nettement plus productif.
Même s'ils ne vous transmettent pas tout leur
savoir, les experts vous guident au mieux dans votre
apprentissage.
Malheureusement,
s'il est aujourd'hui devenu naturel d'utiliser un moteur
de recherche pour trouver des documents disséminés
un peu partout dans l'entreprise, il n'en est pas de
même pour la recherche de compétences et
d'expertise. Accéder au capital intellectuel
de l'entreprise depuis une interface simple et conviviale,
tel est le nouveau défi des moteurs de recherche.
Mais comment "référencer" ce
qu'il n'est pas possible de matérialiser simplement,
l'expertise ? La réponse à cette question
se trouve dans les outils dits de localisation d'expertise.
Du bon profil
Ces outils se présentent généralement
sous la forme de moteurs de recherche s'appuyant sur
des bases de profils d'experts. Ces profils, qui contiennent
un descriptif des compétences des personnes auxquelles
ils se réfèrent, vont être construits
de la même manière que les profils des
visiteurs de sites Web marchands utilisant des outils
de personnalisation. Ils vont être créés
soit de manière explicite, c'est à dire
sur la déclaration des compétences par
les experts eux-mêmes, soit de manière
implicite, grâce à "la surveillance
des faits et gestes" de ces experts. Certains outils
créent par exemple des profils d'expertise en
fonction des publications de chaque individu, des centres
d'intérêts déclarés et des
emails envoyés.
Cette base de profils étant
réalisée, les collaborateurs de l'entreprise
vont alors pouvoir rechercher les experts pouvant répondre
à leurs besoins. L'expression de la demande est
une étape délicate dans la mesure où
c'est elle qui va en partie conditionner la liste des
experts susceptibles d'y répondre. Une requête
mal exprimée ou contenant une part d'implicite
trop importante ne permettra pas au système de
localisation d'expertise de répondre correctement
aux attentes de l'utilisateur.
Quoi de plus normal alors
de déléguer la plus grande partie du problème
à l'utilisateur lui-même. C'est lui qui
est certainement le plus apte à déterminer
l'expertise nécessaire pour répondre à
sa requête. Ainsi, après avoir défini
sa demande avec quelques mots-clés, l'utilisateur
pourra, selon les outils, définir le ou les domaines
de compétences requis pour satisfaire son besoin.
Le système pourra alors cibler sa recherche sur
les domaines indiqués.
Quel expert peut m'aider
?
Il serait faux de penser qu'il existe un système
capable de sélectionner un seul expert, le meilleur.
En pratique, l'utilisateur se retrouve avec une liste
de plusieurs individus en mesure de l'aider. Il est
toutefois important de noter que pour des questions
complexes, plusieurs experts peuvent être nécessaires
pour résoudre des parties spécifiques
du problème. En revanche, pour des problèmes
"simples", la sélection du "bon"
expert, celui que l'on va solliciter, est une phase
importante.
Cette sélection
peut se faire selon plusieurs critères. Tout
d'abord, l'organisation de l'entreprise peut conditionner
le processus. L'outil peut par exemple rechercher un
expert situé dans les locaux, proche géographiquement
ou bien parlant la même langue. La charge de travail
peut aussi être un critère déterminant.
Il est plus rentable pour l'entreprise que l'on sollicite
des experts ayant une charge de travail peu importante.
Enfin, la performance et le niveau d'expertise sont
des éléments clés. Pourquoi ne
pas noter les experts suivant la qualité de leur
réponse lors de leurs dernières sollicitations
?
Enfin, une fois le bon
expert sélectionné, arrive la dernière
étape, celle qui constitue véritablement
la raison d'être des outils de localisation d'expertise,
la mise en relation grâce à des outils
de communication comme l'e-mail, le chat, etc.
Encore de nombreuses
limites
Les systèmes possédant un niveau
de sophistication élevé sont peu nombreux,
la plupart des outils existant ne permettent pas de
faire une sélection d'expertise aussi fine que
celle décrite précédemment. Par
conséquent, un certain nombre d'erreurs peuvent
être commises, comme la sélection d'un
expert trop occupé pour répondre ou bien
celle d'un expert ayant un niveau de compétences
insuffisant pour pouvoir répondre à la
question posée.
La préoccupation
de localisation d'expertise est relativement récente
car les entreprises s'étaient jusqu'alors concentrées
sur l'accès à leurs ressources explicites,
c'est à dire aux documents, et non aux ressources
tacites détenues par les individus. C'est avec
l'arrivée du travail collaboratif qu'est survenu
le besoin de gérer les expertises dans l'entreprise.
De ce fait, ces outils sont encore émergeants
et il est normal que de telles limites subsistent encore
aujourd'hui.
D'abord un problème
de confiance
Comble du paradoxe, le principal frein à
l'utilisation généralisée de ce
type d'outil est l'individu lui-même. En effet,
même s'ils peuvent rendre d'immenses services
en offrant la meilleure expertise, ces outils peuvent
être ressentis comme des espions de la hiérarchie
et des ressources humaines pour "jauger" les
compétences des uns et des autres. Il faut avouer
que la tentation pourrait être grande car ces
systèmes permettent d'avoir une bonne vision
des compétences des individus.
Il est primordial, pour
que le système soit adopté par tous, qu'un
climat de confiance règne pour son utilisation.
Laisser le choix à chaque individu de masquer
telles ou telles connaissances et de ne rendre visible
que les compétences sur lesquelles il souhaite
être sollicité est une nécessité.
de culture d'entreprise
et de management.
D'autre part, une notion importante, mais qui n'est
pas encore prise en compte par les systèmes de
localisation d'expertise, est la motivation à
coopérer en répondant aux questions. En
effet, pour des raisons personnelles, certains individus
sont plus ou moins enclin à aider les autres.
Les systèmes actuels
partent de l'hypothèse que tout le monde coopère
de la même manière. Ils ne tiennent pas
compte de la motivation de coopération. Le meilleur
expert pour résoudre le problème d'un
autre, n'est pas forcément celui qui a le plus
de connaissances sur le sujet, c'est celui qui a les
connaissances suffisantes et surtout la motivation nécessaire
pour aider à résoudre le problème.
Vous l'aurez compris, avant
d'être un simple problème informatique,
la mise en place d'outils de localisation d'expertise
est avant tout une question de culture d'entreprise
et de management.
Quelques
outils qui traitent la localisation d'expertise:
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Un marché encore
en devenir mais très prometteur
Le marché des outils de localisation d'expertise,
qui se trouve à la croisée des marchés
du travail collaboratif, du knowledge management et
de l'accès à l'information, est encore
confidentiel. Cependant, il est promis à un bel
avenir. En effet, les outils de localisation d'expertise
couvrent un besoin extrêmement stratégique
pour les entreprises : l'amélioration de la circulation
des connaissances afin d'augmenter la productivité
ou encore de faciliter le processus d'innovation.
Ainsi, les outils de localisation
d'expertise s'intègrent dans un domaine plus
large d'outils qui se pré-occupe du problème
plus global de la gestion de l'expertise dans l'entreprise
: systèmes de questions-réponses, outils
de gestion de communautés, etc.
De plus, gageons qu'ils
vont jouer un rôle important dans le développement
des plate-formes collaboratives P2P pour former le poste
informatique de demain.
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