Consolidation
: oui, si mon concurrent le veut bien !
Fusionner avec une entreprise tierce ne va pas forcément de soi, signe que la course à la taille critique est actuellement acharnée. Les exemples actuels de PeopleSoft, Pivotal et Novell nous le prouvent. (Jeudi 20 novembre 2003)
Les avantages (mais aussi
les inconvénients) des mouvements de consolidation,
dans un marché donné, sont connus de tous.
Les acteurs concernés mettent le plus souvent en
avant les complémentarités géographiques,
de gamme de produits ou de technologie mais aussi les
économies d'échelle qui peuvent être
réalisées sur certains départements
redondants (soit des licenciements potentiels).
Que ce soit dans le secteur des ERP, du CRM ou de l'Open
Source, certaines sociétés ont dans les
mois qui viennent de s'écouler entrepris - ou tenté
d'entreprendre - des rapprochements stratégiques.
Mais, comme nous allons le voir, certains de leurs concurrents
ne l'ont pas entendu de la même oreille, signe de
la fébrilité patente dans laquelle se trouvent
actuellement certaines entreprises en quête de relais
de croissance.
PeopleSoft/J.D.
Edwards, Pivotal/Talisma et Novell/SuSe : mariages empêchés
? Les trois binômes
d'entreprises cités ci-dessus tentent actuellement
de se rapprocher. Mais force est de constater que leur
environnement concurrentiel n'est pas des plus coopérants...
Dans un système économique où lesdites
sociétés sont cotées en bourse, rien
d'anormal a priori à ce que des contre OPA
- et accessoirement toute autre action destinée
à contre-carrer ces mouvements - soient lancées.
Un des exemples les plus médiatisés concerne
bien entendu l'OPA
hostile lancée par Oracle sur PeopleSoft, quelques
jours seulement après que ce dernier ait annoncé
son
rapprochement avec l'éditeur J.D. Edwards.
L'affaire est en cours de traitement par les autorités
américaines et européennes compétentes
qui ont à juger de son caractère éventuellement
monopolistique (anti-trust).
Oracle, qui se retrouve - dans l'état actuel des
choses - relégué à la troisième
place mondiale des éditeurs de progiciels de gestion
intégrée, a senti le vent tourner lors de
cette fusion. Nonobstant le caractère particulièrement
fougueux de son P-DG, Larry Ellison, la réaction
a été immédiate, signe que la concentration
amorcée par PeopleSoft
revêtait un caractère hautement stratégique
et virtuellement déstabilisant pour le spécialiste
mondial des bases de données.
Pivotal : qui remportera la cagnotte ? Le deuxième
cas d'école concerne Pivotal qui tente, lui aussi,
de fusionner (avec Talisma). Les synergies sont évidentes
pour les deux acteurs : complémentarités
géographiques, actionnariat commun, gammes qui
s'imbriquent les unes dans les autres... Mais cette fusion
attise les convoitises.
Le premier concurrent à s'être manifesté est Onyx, éditeur
de solutions CRM qui, comme toutes les entreprises du marché de la relation
client, a subi les contre-coups de la crise des trois dernières années
et recherche, comme tous les autres, des relais de croissance... éventuellement
externes. Deuxième invité surprise après Onyx, le groupe
chinois Chinadotcom s'est également fait connaître avec une offre
(rejetée comme Onyx) dont les modalités n'ont pas été
communiquées. La consolidation n'est, on le voit, pas l'apanage des sociétés
dites occidentales. Novell
/ SuSe : un trouble fête inattendu Dernier exemple - un peu moins parlant
mais néanmoins révélateur de l'actuelle course effrénée
à la taille critique - celui de Novell qui a annoncé le 4 novembre
dernier vouloir racheter l'éditeur allemand de distributions Linux SuSE.
On apprenait hier que l'inévitable SCO pourrait s'opposer à ce rachat
car des clauses de non concurrence auraient été incluses dans le
contrat signé entre Novell et SCO (à l'époque Santa
Cruz Operation) au moment de la cession des droits Unix à
SCO par Novell...
Si l'on regarde cette affaire
sous un autre angle, on peut également y voir une
possible tactique de SCO destinée à empêcher
l'émergence d'un acteur libre de toute contrainte
vis-à-vis de SCO. Grâce à la fusion
des droits de propriété et des accords de
licences respectifs de Novell et de SuSe, d'aucuns s'accordent
en effet à dire qu'une distribution Linux inattaquable
au regard des revendications de SCO (si tant est que ces
dernières soient recevables, ce qui reste à
prouver...) pourrait en émerger.