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Alexandre Zapolsky
P-DG
Linagora
Alexandre Zapolsky
"Je souhaite que le Minefi fasse lui aussi le choix de solutions libres pour le poste de travail"
Très prolixe, le patron de la SSLL a passé en revue l'ensemble des thèmes propres aux logiciels libres soumis par les lecteurs, des choix politiques aux gros contrats récemment passés.
22/02/2007
 
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 Linagora
Vous avez levé 1,8 million d'euros récemment, qu'allez-vous en faire ?
Alexandre Zapolsky. L'augmentation de capital sert au financement de BFR - le besoin en fond de roulement -, c'est l'argent disponible pour financer la trésorerie de la société au jour le jour. Elle va aussi nous servir à faire des opérations de croissance externe. C'est d'ailleurs souvent un problème pour les petites sociétés pour qu'elles puissent grandir...

Combien êtes-vous chez Linagora ? Quels sont vos principaux concurrents ?
Nous sommes à ce jour 65 personnes. Nous serons certainement plus de 100 d'ici la fin de l'année. Cela veut dire qu'on embauche... Alors si vous vous sentez l'âme d'un Linuxien, si vous avez envie de vous faire plaisir.... et éventuellement de bien gagner votre vie... alors welcome : recrutement@linagora.com et hop !

Pour les concurrents : il y a plus 400 sociétés spécialisées en logiciels libres... Ils seraient donc trop nombreux à citer... Il y a aussi les grandes SSII. Mais les vrais concurrents pour Linagora - qui ambitionne de devenir le leader du logiciel libre en Europe -, ce sont les boîtes américaines : SourceLabs, Openlogics... Et bien entendu RedHat et Novell !

20 000 clients et 2 500 serveurs Linux chez PSA, qu'est-ce que cela vous inspire ?
C'est une très bonne nouvelle pour l'ensemble du marché. Cela démontre que le logiciel libre touche aujourd'hui les grands acteurs du privé. Cependant... je regrette leur choix de Novell. Faire le choix de Novell, ce n'est ni moins bon, ni mieux que de faire le choix de Microsoft.

Le "partenariat" entre Novell et Microsoft vous inquiète-t-il ?
Non, cela ne m'inquiète pas. Mais je me posais la question de la stratégie libre de Novell. Maintenant j'ai une certitude : Novell ne fait pas de libre.

Que pensez-vous du consortium Open Solutions Alliance qui vient d'être créé ?
   
  Nous devons nous doter en Europe d'une grande force de lobbying"
Je trouve que c'est une très bonne initiative ! mais nous devrions faire la même chose au niveau européen. Les intérêts ne sont pas les mêmes entre l'Union Européenne et les Etats-Unis... Surtout dans l'économie de l'immatériel.

J'ai rencontré certains de mes homologues espagnols, suédois, allemands, etc... Et je pense que nous devons nous doter en Europe d'une grande force de lobbying... Parce que pour le moment, l'OSA, c'est surtout des sociétés américaines.

Où en est-on au juste de ce pôle de compétitivité sur les logiciels libres dont on a parlé il y a quelques semaines ? On en reparlera après les élections ?
J'espère bien que l'on en parlera encore de ce pôle après les élections... Pour le moment, nous sommes en attente de la labellisation officielle du gouvernement. Cela aura lieu à l'occasion d'un CIACT - un Comité Inter Ministériel d'Aménagement et de Compétitivité du Territoire.

Attendez-vous des politiques qu'ils s'engagent concrètement pour l'Open Source ? Savent-ils déjà au moins de quoi il s'agit ?
Je crois que la plupart des hommes et des femmes politiques ne savent pas réellement ce que c'est que le Logiciel Libre. Certains comprennent une partie des enjeux. Mais ce qui est important, c'est que les membres de leur cabinet comprennent ces enjeux. Avec l'ASS2L, nous y travaillons quotidiennement. C'est la raison du pôle Ouverture Paris Région - le pôle de compétitivité du Logiciel Libre -

Faut-il faire de la politique - ou alors bien connaître les politiques - pour réussir à monter une SSLL ?
Je ne sais pas si vous parlez de moi ... mais puisque vous me posez la question, j'imagine que oui. Alors, il est certain que bien connaître les rouages de la politique aide toujours à faire progresser son entreprise...

Mais, pour ma part, je mets mes contacts et mon travail vis-à-vis des politiques au service d'une cause qui me paraît plus essentielle : faire progresser dans son ensemble le marché du logiciel libre et faire en sorte que l'Europe et la France jouent un rôle de premier plan au niveau mondial dans ce marché !

Le responsable du projet Samba vient de quitter Novell. Comprenez vous sa décision ?
   
  Si vous voulez que la poule continue à pondre des œufs d'or, alors il faut la nourrir !"
Je ne peux pas tout dire eu égard à l'accès que je peux avoir en tant que professionnel à certaines informations... mais, oui, je peux le comprendre.

Quand vous avez des convictions et que l'on vous demande d'aller contre elles, je crois que vous n'avez pas d'autre choix que de prendre un nouveau chemin... Ce n'est pas le seul qui partira... soit dit en passant...

Vous parlez de Red Hat comme d'un compétiteur. Cependant, vous supportez le serveur JBoss entre autres. Envisagez-vous des partenariats avec ces grands acteurs ?
Je pense que si RedHat est réellement libre, que si Jboss est réellement libre, alors tout acteur économique du moment qui en a les compétences, peut être en mesure de supporter ces solutions pour le compte de ses clients !

Ceci dit, je pense qu'il est nécessaire de trouver un modèle vertueux où des sociétés comme Linagora, quand elles vendent de l'OSSA - Open Source Software Assusance - trouvent le moyen de répartir au mieux leurs revenus et d'en faire profiter les éditeurs qui sont à l'origine de ces projets. C'est l'histoire de la poule aux œufs d'or... Si vous voulez que la poule continue à pondre des œufs d'or, alors il faut la nourrir !

Equateur, Cuba, Brésil... les pays d'Amérique latine ou centrale ont l'air plus prompts à basculer vers les logiciels libres que les pays européens, non ?
Il est certain que ces pays d'Amérique Latine ont très bien compris leur intérêt et qu'ils jouent à fond la carte du libre. C'est un exemple pour tous les pays européens. Mais rassurez vous, il se passe des choses formidables chez nous dans la "vieille Europe"...

Quels sont les principaux clients que vous avez signés récemment ?
Nous avons gagné récemment avec nos collègues de Sun un très beau projet concernant le Plan Global de Secours de la Gendarmerie nationale. C'est génial de travailler pour eux ! On monte une architecture énorme avec du Debian plein partout, du Nagios, de l'OCS Inventory... J'en passe et des meilleurs ! Un vrai régal.

Nous travaillons aussi sur un projet passionnant pour un grand groupe industriel que nous aidons à tirer parti des méthodes de développement pour l'un de leur centre R&D qui compte plus de 1 000 Personnes ! Et puis sur l'OSSA, nous avons des clients comme La Poste, La Macif, Orange... Mais chut je ne suis pas certain que j'ai le droit de vous dire tout cela. Vous n'êtes pas un concurrent j'espère ?

Et en Europe, que se passe-t-il de bien dans les logiciels libres ?
   
  Si l'on veut continuer à être fort en Europe, il faut des sociétés qui soient capables de rémunérer correctement les développeurs du libre"
Il y a beaucoup de gens qui s'intéressent au libre, dont vous apparemment... Plus sérieusement, on va avoir en France, un pôle de compétitivité dédié aux logiciels libres.

Cela veut dire que si des entreprises et des centres de R&D veulent travailler sur de la R&D Libre - faire en sorte qu'à la fin des travaux on ait du logiciel libre - alors ils pourront obtenir plus facilement des financements. Jusqu'à 70 % des montant de R&D ! Imaginez comme certains font la gueule... La Commission européenne travaille beaucoup à la promotion du libre.

Elle vient de publier une étude remarquable - dont un français Philippe Aigrain à travaillé dessus - qui démontre pourquoi il est aussi important de mettre en place une politique industrielle européenne dans le domaine des logiciels libres.

J'ai encore beaucoup d'exemple... mais je ne tape assez vite ! Alors il serait bien que l'on parle tous ensemble lors du prochain Paris Capitale du libre qui aura lieu les 13 et 14 Juin prochains. Il y aura tout plein de drapeaux dans Paris pour battre le rappel. Et pendant deux jours on parlera entre Européens de ces sujets.

Quel est le bon ratio à reverser pour que la poule soit nourrie : ratio développement personnel / développement pour le collectif ?
Comme dirait Ségolène, c'est une bonne question ! Je rigole bien sûr... Plus sérieusement... je n'ai pas la réponse exacte... On en est au tout début de l'histoire de l'économie du logiciel libre. Je me dis qu'il faut que chacun y trouve son compte si on veut le modèle se perpétue....

Je sais que beaucoup d'entre vous développent par pur plaisir... Mais je me dis que si l'on veut continuer à être fort en Europe dans le libre, il faut des boîtes qui soient capables de rémunérer correctement - voire très correctement - les développeurs du libre...

La guerre des formats bureautiques - ODF / Open XML - est-elle un véritable enjeu ou une simple querelle de clochers ?
C'est essentiel ! Encore une fois, Microsoft vient perturber le marché. On a besoin que d'un seul standard. Microsoft, s'il veut vraiment que nous le respections, n'a qu'à adopter le format ODF, puisque c'est aujourd'hui le seul et vrai format ouvert de documents. Alors que Microsoft se décide enfin à jouer le jeu. Sinon, le marché, c'est-à-dire vous, les clients, finiront par le rejeter complètement.

Selon vous, quelle va être la prochaine administration française à choisir des solutions libres massivement ?
   
  Les ERP sont prêts aujourd'hui pour les PME ou pour les grandes sur des solutions verticalisées"
C'est à dire après la Gendarmerie Nationale ? Elle fait tourner aujourd'hui 70 000 PC avec OOo et Firefox... La culture - 15 000 PC - et l'équipement - 40 000 je crois - aussi. La prochaine sera l'Agriculture - 15 000 postes - et je souhaite que le Minefi fasse aussi le choix de solutions libres pour le poste de travail.

Les solutions sont là. Je sais le courage de l'ensemble des personnes de la DSI de ce ministère. J'ai confiance en leur vision. Et puis, bien entendu, l'Assemblée Nationale s'équipe en logiciels libres.

Je suis DSI d'une grosse société agroalimentaire. Où en est la maturité des ERP libres aujourd'hui ? Quelle solution ai-je à ma disposition ?
Génial, avec le chat du JDN Solutions, on trouve aussi des clients. Les ERP sont prêts aujourd'hui pour les petites et moyennes entreprises ou pour les grandes sur des solutions verticalisées... Je vous conseille une solution géniale avec des gens hyper "pro" : OpenBravo.

Ce sont des anciens d'Accenture, ils connaissent très bien les ERP... Bon, ok, ils sont espagnols... et alors ? Nous, on les connaît très bien. Et je suis certain qu'ils feront un carton rapidement en Europe.

Les missions des SSLL ne se rapprochent-elles pas de plus en plus de celles des SSII traditionnelles ?
Au contraire ! Je crois que plus le temps passe, plus on voit une complémentarité des modèles. On utilise d'ailleurs le terme SS2L, pour parler des Sociétés Spécialisées en Logiciels Libres, et non plus uniquement pour parler des Sociétés de Services en Logiciels Libres...

Parce que la diversité des acteurs du libre est réelle, qu'il y a de plus en plus d'éditeurs Open Source, d'éditeurs orientés service... Alors tout ce monde là s'appelle SS2L est c'est très bien ainsi. Et nous travaillons main dans la main avec les grandes SSII.

Quels messages voulez-vous faire passer aux candidats à l'élection présidentielle ?
D'abord, j'aimerais profiter de la question pour saluer le formidable travail de nos collègues de l'APRIL sur ce sujet : avec le site candidats.fr. Ils ont fait en sorte que chaque candidat puisse se prononcer clairement sur le sujet du libre. Je vous invite d'ailleurs à signer la pétition en ligne sur le site.

Concernant mon message aux politiques, il est toujours le même : le Libre est une chance économique formidable pour la France et l'Europe, nous ne devons pas la laisser passer. Le libre crée plus d'emplois que le monde traditionnel du logiciel.

Il faut donc l'aider, l'encourager et le soutenir. Pour les autres questions, il y en a d'autres (APRIL, AFUL, Framasoft, etc...) qui sont bien mieux placés que moi pour s'adresser aux politiques.

Vous faites confiance au Minefi. Que pensez-vous du projet du Référentiel Général d'Interopérabilité ?
   
  Nos gouvernants sont malheureusement trop souvent sous influence"
Je fais confiance au Ministre des Finances, Monsieur Breton, et à ses équipes. C'est un ministre courageux et qui est l'un des très rares hommes politiques à très bien avoir compris les enjeux des logiciels libres ! Il y avait plusieurs questions concernant le politique.

Ce que je sais, c'est que où que Monsieur Breton soit dans l'avenir, dans l'intérêt du logiciel libre, nous aurons à le soutenir. Parce que c'est quelqu'un de bien.

Pour le RGI, il faut être très clair. Le sujet est traité chez le Ministre de la Réforme de l'Etat. Il donc aller de ce côté là. Et du côté de son cabinet. Nos gouvernants - mais pas tous - sont malheureusement trop souvent sous influence...

Qui est le candidat qui est le plus logiciel libre selon toi ?
Un ange passe... Je crois que Monsieur Bayrou à démontré sa détermination à comprendre le sujet - notamment en venant à Solutions Linux - mais je ne suis pas certain qu'il ait encore tout compris - cf l'une de ses interviews sur Solutions Linux...

Ségolène Royal a peut-être compris le côté social du libre mais certainement pas le côté économique. Même si j'ai eu la chance de la rencontrer cet été aux cotés de RMS... Je n'étais peut être pas bon pédagogue…

Concernant M. Sarkozy, il a été mal servi avec ses campagnes de SarkoSpam, mais je crois que, sur le fond, c'est peut-être lui qui a le mieux compris les enjeux du libre... Cependant, il faudra être vigilant si jamais il gagne parce que, autour de lui, certains ne sont pas forcément pour le libre ou en tout cas ont de fortes relations avec Microsoft et autres... Donc le "Sarko", sous vigilance quand même.

Quelles sont vos relations avec les communautés Open Source / du logiciel libre ?
Je dois tout aux communautés ! J'ai souvent été assez maladroit, voire certaines fois provocateur... je souhaitais me faire entendre... passer un autre message : plus économique. Il faut toujours rendre hommage aux femmes et aux hommes qui bossent chacun à leur niveau pour faire progresser le libre...

Certes, il y a des porte-voix, des gens plus visibles que d'autres... Mais en réalité, la force du libre, c'est chacune de ses composantes. C'est chacun de vous et chacun de nous. Laissez moi vous faire une confidence... ce dont je suis le plus fier, c'est d'appartenir à ce monde. Au monde du Logiciel Libre.

Combien de SSLL actuellement en France ? Qui les regroupe, les "syndique" ?
Lors du dernier "comptage" réalisé cet été au moment de créer le pôle Logiciel libre, nous en avons compté plus de 400 ! Je pense qu'il s'en crée une tous les deux jours. C'est une bonne chose. Plus nous serons nombreux, mieux cela sera ! Montez des boîtes ! Investissez vous !

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 Linagora

Pour ce qui concerne leur représentation, pour ma part je considère l'ASS2L - qui deviendra prochainement la FNILL, Fédération Nationale de l'Industrie du Logiciel Libre - comme étant le syndicat fait pour représenter ces sociétés. La FNILL est faite pour cela. Mais, comme toute fédération, elle aura aussi pour mission de regrouper les autres entreprises... Plus les entreprises se regroupent, mieux c'est.

Merci à vous tous. C'est à chaque fois un grand plaisir ! Restons vigilants... le combat continue !

 
Propos recueillis par Fabrice DEBLOCK, JDN Solutions

PARCOURS
 
 
Alexandre Zapolsky est P-DG de Linagora. Il est diplômé de l'Institut National des Télécommunications (promotion 2000).

   
 
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