Rechercher :         

Sociétés Prestataires Carnet Formations Progiciels Encyclo Fonds Guide d'achat Téléchargement
Interviews

Dominique Moisand
Directeur associé
A.S.K. Conseil

"Avec une bonne réflexion et les outils CRM adaptés, la rentabilité est très rapide"
          

Après avoir abordé dans une première partie certains aspects organisationnels de la refonte des processus sur les projets e-business en général, nous nous penchons sur le cas particulier du CRM (customer relationship management). Dans ce cadre, quel est le rôle de l'information clients ? dans quelle optique faut-il intégrer les canaux ? qui doit être le porteur du projet ? et comment générer le retour sur investissement tant attendu ? Dominique Moisand, directeur associé du cabinet A.S.K. Conseil et expert de la conduite du changement dans le domaine de la gestion de la relation client, apporte des réponses à toutes ces questions. Objectif affiché : réduire le taux d'échec des projets CRM.

Lire la 1ère partie : "La refonte des processus passe par l'empowerment des acteurs du terrain"


Propos recueillis par François Morel le NaN undefined NaN .

JDNet Solutions : pour améliorer la relation client, un reporting suffit-il auprès des différents points de contact ?
Dominique Moisand : Deux aspects doivent être pris en compte. D'une part, il est clair que le responsable ne peut accomplir correctement sa tâche s'il ne dispose pas de toutes les informations nécessaires. Si l'on évoque la question des délais de livraison, le produit doit être fourni à la date promise, ni avant ni après. C'est pareil pour l'information, qui doit être là quand on en a besoin. Et là, le CRM résoud des problèmes mais ne rend pas compte de toutes les interactions en terme de ressources humaines.

Par exemple, prenons le cas d'une PME avec une administration des ventes située entre le centre d'appels et la direction commerciale. Ajoutons que les forces de vente sur le terrain y sont organisées par régions. L'une des questions à laquelle le CRM ne répond pas de façon automatique, y compris dans les dernières versions des progiciels du commerce, est que le client peut choisir de s'adresser à l'administration des ventes, aux commerciaux, ou même au centre d'appels, pour réclamer un devis. Or, il pourra parfois obtenir deux ou trois réponses différentes, bien sûr. Afin de garantir une bonne réactivité, il faut donc mettre en place des pratiques communes. Et le problème se pose de savoir à qui appartient le client.

L'administration des ventes est-elle un secrétariat pour les forces de vente ? Le commercial est une personne qui a les pieds sur terre. S'il n'est pas clair qu'il touchera sa commission, il est évident qu'il va résister à la bonne marche du projet. Ce problème essentiel est typique de la conduite du changement: comment les sédentaires de l'administration des ventes et les commerciaux nomades peuvent-ils travailler ensemble ? Si l'un d'eux a besoin d'une information lors d'un déplacement, et que tout le monde à l'administration des ventes est parti à 17h, que fait-il ? Avant de parler du CRM, il faut donc bien redéfinir les rôles. Quand la standardiste oriente trop souvent le client vers le centre d'appels, le commercial ne s'y retrouve pas. Or, la force de vente ne peut pas accepter que quelque chose évolue à son détriment. Si l'on impose un nouveau système, que rend-on au collaborateur ? Le commercial y retrouve-t-il ses clients ?

Justement, le fait d'intégrer les canaux ne pallie-t-il pas l'absence de l'administration des ventes à partir de 17h, avec une information directement utilisable ?
L'augmentation de la vitesse dans la prise de décision réclame l'intégration des canaux. Il s'agit d'une condition nécessaire, mais pas suffisante. La conduite du changement passe systématiquement par les ressources humaines et les technologies de l'information, qui sont deux atouts essentiels. Mais dans certains cas, ce sont la direction commerciale, la direction marketing et la DSI qui doivent travailler ensemble. Entre ces trois poids lourds, la décision n'est pas facile et il faut parfois prendre des risques. Ce qui explique le positionnement d'ASK Conseil.

Je pense que le workflow est une question presque plus essentielle que la fonction de l'application elle-même. Maintenant, est-il préférable d'avoir un très bon workflow ou une application de gestion des forces de vente performante ? Il apparaît difficile d'avoir les deux tout de suite, car ce n'est pas toujours compatible avec les étapes d'un projet.

Sans intégration, pas de vision unifiée du client. N'êtes-vous pas d'accord avec cela ?
Ce terme de vision commune ou unifiée revêt deux sens différents selon qu'il est employé dans un contexte de ressources humaines ou de bases de données. En fait, il existe comme cela beaucoup de mots piégés. Dans un cas, cela n'a rien à voir avec l'autre. Les mots divisent et les images rassemblent. D'où l'importance du site Internet, qui est probablement la première vision commune de l'entreprise.

Dans une organisation, qu'elle soit segmentée par produits, par régions ou par grands marchés, une personne arrive en disant : "je suis le responsable sécurité, et tout le reste ne me concerne pas". Mais il n'est pas possible ni souhaitable de raisonner ainsi. Le site web est un révélateur de la capacité de l'entreprise à se défendre vis-à-vis de l'extérieur, mais s'il ne fonctionne pas correctement à cause de cela, l'image de marque de l'entreprise en pâtit. Le responsable de la sécurité doit donc faire l'effort d'intégrer sa vision au reste pour parvenir à un consensus en fonction d'une équation très réduite.

Il s'agissait de la vision unifiée en rapport avec les bases de données...
Cette vision s'exprime par l'interrogation suivante : "le centre de contacts et les forces de vente recevront-ils les mêmes informations transmises à partir d'une même source ?". Mais le CRM est d'abord une question d'intégration des processus et pas des données. Le fait de tout concentrer sur un serveur au fond d'une salle comme le suggère IBM est seulement la vision d'un éditeur. Il est plus important de briser les chapelles et de travailler les processus.

A titre d'exemple, la direction marketing exploite pour son compte un certain nombre de bases de données. Puis, elle entretient une interaction très forte avec une autre base située à l'extérieur, parce qu'elle est amenée à croiser ses informations sur les prix de vente d'un fournisseur. Ce n'est pas pour cela que l'on doit rapattrier l'intégralité de cette base à travers l'entreprise dans la direction marketing. La véritable question est donc liée au processus. Qu'est ce qui doit être partagé ? Et là, nous arrivons à une vision qui sera beaucoup plus orientée workflow. Je parcoure au mieux le processus selon ce dont j'ai besoin.

En matière de gestion de la relation client, qui doit porter le projet ?
Un projet CRM nécessite un sponsor, quelqu'un de très haut placé dans la hiérarchie de l'entreprise, ou qui soit en tout cas très représentatif de l'entreprise et qui puisse donner sa vision. Il ne devrait pas exister de projet CRM sans vision à trois ans. Des étapes intermédiaires doivent être définies pour le bon déroulement du projet. Nous insistons pour que celui-ci soit porté par quelqu'un de très haut dans l'entreprise. En même temps, il faut aussi qu'il soit porté par la maîtrise d'ouvrage et des cabinets indépendants comme nous. Dans la direction de projet CRM, je souhaite retrouver des représentants des directions métiers, commerciale, marketing, et des systèmes d'informations. Si la production est impactée, il faut un responsable de production, et de même pour la chaîne logistique. Sans oublier les directions des ressources humaines, qui sont toujours très présentes et très actives.

Ce comité doit être dirigé par l'un des membres cités. Et il faut que cette personne soit reconnue pour sa capacité à réunir les gens et à faire partager la vision commune. Il ne faut surtout pas prendre quelqu'un qui divise, car le CRM est essentiel dans la conduite du changement. Une autre façon de dire cela revient à signaler que la DSI est très mal placée a priori pour prendre la direction du projet. Le principal risque d'un projet mené par la direction informatique est d'en faire un projet technologique et de se trouver en butte à la conduite du changement. Le manque de maîtrise d'ouvrage est toujours identifié comme un risque projet. Dans les projets CRM, c'est un risque majeur.

Le rôle de porteur du projet n'incombe-t-il pas à la direction générale ?
Bien sûr, la direction générale pourrait être chargé de tout le transverse puisqu'elle voit tout le monde dans l'entreprise. Et je dis bien "projet transverse" car l'on ne se situe pas dans une structure hiérarchique. Un comité peut être un groupement qui travaille sur le processus de la gestion de la relation client. Mais attention: le porteur du projet doit insuffler les grandes options sans tomber dans la notion dépassée de direction autocratique. En attendant, le vrai problème intervient quand on ne trouve personne sur le processus. Et là, autant trancher dès le début sur la constitution du comité en réunissant les personnes et en regardant quelles sont celles qui comptent. Mieux vaut, en effet, découvrir d'emblée les problèmes que s'apercevoir après qu'il n'existe pas de cohésion sur le processus.

Quant à la DSI, si elle n'a pas de légitimité pour piloter les projets, quel doit donc être son rôle ? Et celui-ci ne devient-il pas parfois un peu ingrat ?
C'est un autre chapitre très important. Nous avons vu (dans la première partie de l'interview, ndlr) que la DSI s'organisait en deux lignes de services, la production et les projets, et qu'elle se comportait comme une petite SSII généraliste. A partir de là, comment doit-elle procéder avec un nouveau projet ? La DSI est garante du système d'information actuel et futur, et elle se trouve souvent en position de légitimité faible voire nulle, et n'est pas toujours reconnue par les autres directions. Cela amène par exemple la direction marketing à s'organiser avec un prestataire pour gérer son entrepôt de données.

Nous arrivons à une situation où il faut que la DSI retrouve son véritable rôle de direction informatique. Probablement, elle doit assumer un rôle de participation au projet, ne serait-ce qu'à l'égard de son jalonnement dans le temps. Nous arrivons ensuite à la technologie elle-même, et la question devient: "est-ce que le chef de projet interne peut devenir chef de projet nouvelles technologies ? ". Ce n'est pas toujours le cas, et il est parfois préférable, pour des raisons de performance, d'avoir recours à des chefs de projet externes qui ont l'expérience de traiter des problématiques analogues chez d'autres clients. L'écueil concernant la DSI serait de rester sur son rôle de légitimité technique. Il faut savoir lui reconnaître d'autres rôles que cette expertise.

Pour éviter que celui-ci ne devienne trop ingrat, l'une des solutions consiste à éviter de créer une trop grande rupture entre la maîtrise d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre, entre les équipes internes et les spécialistes de l'extérieur. Dans cette optique, la constitution d'équipes mixtes est une bonne réponse. Ceci, tout en gardant à l'esprit le contexte de budget et de ressources limités. Mais là, nous tombons dans un sujet différent qui s'exprime en terme de mise en oeuvre du projet, et qui touche au fonctionnement du binôme maîtrise d'oeuvre/maîtrise d'ouvrage. Cette étape se situe dans le prolongement du cahier des charges. Doit-il décrire le produit ? ou alors est-ce un travail itératif où l'on découvre les potentialités au fur et à mesure ? Nous sommes ici dans une deuxième approche dite "par plateaux" où l'on réunit des spécialistes de l'informatique, de la gestion de projet, du planning, etc., avec qui l'on forme une équipe. Et nous entrons dans le domaine de savoir comment spécifier et gérer un projet de nouvelles technologies pour informatiser un processus transverse.

Doit-on impliquer les utilisateurs dans le projet ? Et comment ?
La présence de l'utilisateur peut s'envisager sous plusieurs angles. Une première démarche consiste à lui demander ce qu'il souhaite, avec les difficultés que l'on connaît et les perspectives qu'il ne connaît pas. La deuxième approche consiste à lui demander de valider les changements et les orientations, en lui proposant de réagir d'une façon critique à ce qui lui est proposé. Et une troisième approche concentre les deux, ce qui revient à relier la conduite du changement et le déroulement du projet en fonction des étapes. Lorsque l'on travaille avec l'utilisateur, l'on procède en même temps à la refonte des processus, à la conduite du changement, sans l'emmener du jour au lendemain de la spécification à l'utilisation. Il est donc important de se demander comment gérer la refonte des processus.

Par exemple, dans l'entreprise, des responsables de la chaîne logistique sont chargés de optimiser le processus, et ce sont des acteurs incontournables du projet. Dans tous les cas, il faut des responsables de chaque équipe concernée. Mais si je n'ai pas la chance d'avoir ce responsable, un consultant va jouer ce rôle.

Pour en finir avec une question fondamentale, le retour sur investissement des projets CRM semble avoir déçu bon nombre d'entreprise. Comment peuvent-elles l'améliorer ?
Tout le monde le dit dans le milieu du conseil : il faut savoir d'où l'on part et quel projet l'on vise. Le responsable doit se poser des questions comme "quelles sont les métriques et les coûts que je maîtrise ?", "est-ce que je sais combien coûte un nouveau client ?", et "suis-je capable de définir quel est le cycle de vie du client ?". Nous sommes très surpris du constat que bien des sociétés françaises ne sont pas très avisées sur ce plan par rapport aux anglo-saxonnes.

Ce travail préliminaire consiste à dresser l'état des lieux sur les grandes métriques. A partir de là seulement, on peut commencer à définir des sous-projets de CRM. Par exemple, le point de départ pour la valeur du client peut être fixé à 50 sur une échelle qui va jusqu'à 100. Dans l'automobile, la durée de vie du client est de cinq ans. Et là, comment va-t-on accroître sa valeur pendant ces cinq années ? L'on peut avoir recours à la vente croisée. Et aussi: comment augmenter le taux de fidélisation ? Et l'on constate qu'avec une bonne réflexion et les outils de CRM adaptés, on peut gagner 20 % très vite. Pas en augmentant le nombre de clients, mais en jouant sur leur valeur. Dans ce cadre, la rentabilité est très rapide.

Un deuxième exemple concerne la direction marketing. Lorsque le ciblage d'une campagne est effectué de manière imprécise, cela débouche sur deux conséquences. D'abord, cela coûte cher en cas d'importants volumes de clients. Ensuite, une campagne mal ciblée est mal ressentie par le client, ce qui fait qu'elle connaît une usure car elle est inadaptée. Dans ce domaine, le premier bénéfice du CRM est d'obtenir un meilleur ciblage des campagnes, donc des coûts qui peuvent être réduits par trois, comme cela a été le cas chez Bouygues Télécom. Par ailleurs, l'on inverse la perception que le client a de la sollicitation. Au lieu qu'elle soit comprise comme inopportune, l'accueil client lui est très favorable. Un bon ciblage consiste à aller vers les clients qui ont exprimé une attente, et qui vont passer plus facilement à l'acte d'achat. Donc en premier, le CRM permet de réduire les coûts ; en deuxième il accroît la satisfaction du client, et en troisième il augmente sa valeur.

Maintenant, les exemples les plus difficile à chiffrer sont ceux qui ont trait à la refonte des processus. Mais l'on peut se focaliser sur la refonte du centre de contacts lui-même qui s'organise comme une petite entreprise. Et là, on peut mettre en oeuvre les métriques connues, et s'apercevoir que l'on perd beaucoup d'argent sur un centre de contacts mal géré. Autrement, les marges de progrès sont énormes en terme de coûts, de qualité, mais aussi de ressources humaines.


Lire la 1ère partie : "La refonte des processus passe par l'empowerment des acteurs du terrain"


Après 12 années passées dans les services informatiques (SSII et le constructeur Digital), Dominique Moisand a lancé l'activité de conseil en management et informatique de PriceWaterhouseCoopers avant de créer, en 1990, ASK Conseil. Focalisé depuis 1995 sur le développement de l'e-business, la refonte des processus dans le cadre de la relation client, les Web call centers et les systèmes d'information associés, il anime également les principaux séminaires CRM de la place de Paris (CGEY, LRA, ASK). Par ailleurs, Dominique Moisand est vice-président de l'association française d'audit et de conseil en informatique (AFAI), le chapitre français de l'ISACA (Information System Audit and Control Association) qui a mis au point les méthodes de gouvernance des systèmes d'information reconnues par les principaux experts (Gartner Group, Meta Group).

  Nouvelles offres d'emploi   sur Emploi Center
Auralog - Tellmemore | Publicis Modem | L'Internaute / Journal du Net / Copainsdavant | Isobar | MEDIASTAY



Gratuit - L'actualité des technologies
e-business

Toutes nos newsletters
 
 
 
 
 
 
Logiciels libres
Retours d'expérience, panorama, analyses.
Sommaire
 
Failles de sécurité
Vulnérabilités des logiciels & évaluation des risques.
Sommaire
 
 

Les entreprises de l'Internet
Plus de 5000 sociétés référencées

Les prestataires
Plus de 2600 prestataires

Les fonds
Plus de 100 fiches descriptives

Le carnet des managers Internet
Plus de 1500 dirigeants

Guide des solutions
Plus de 310 briques logicielles