JDNet
Solutions. Comment évoluent les problématiques
technologiques du secteur banque et assurance ?
Karim Benrais.
L'informatique est hautement stratégique dans ce secteur
car les produits vendus sont basés sur l'information.
Ce sont des produits "virtuels". Donc la capacité
à les modéliser, à simuler leurs impacts économiques puis
à les distribuer repose sur l'informatique.
En amont surtout, pour le marketing de conception des
produits par exemple. La structure d'un produit d'assurance-vie
doit ainsi prendre en considération un cycle de
vie sur plusieurs années,
la modélisation d'un produit de placement son aspect "multi
supports". Ce qui est structurellement différent
d'une assurance dommage ou santé.
Face à ces produits complexes et diversifiés, le
système d'information est donc un support essentiel,
d'autant plus que les réseaux de distribution sont très
nombreux (courtiers, agents, vendeurs salariés, sous forme
électronique, en agence physique, par démarcheurs à domicile),
ce qui implique des technologies à la fois fixes,
web ou mobiles. Nos clients ont une conscience aiguë
de la très forte corrélation entre une informatique efficace
et les performances sur le marché.
Le
système d'information est-il un frein aux fusions - acquisitions,
légions dans ce secteur d'activité ?
Il est vrai que deux entreprises qui ont
investi des milliards d'euros dans leur système
informatique éprouvent des difficultés à
les homogénéiser du jour au lendemain lors
d'une fusion. Mais ce qu'il faut voir, c'est que les dépenses
relatives aux SI représentent entre 4 et 6 % du
chiffre d'affaires d'une entreprise, c'est donc une source
d'économie phénoménale en cas de
rapprochement.
Selon moi, les hommes et le système informatique
sont les deux facteurs clés de réussite
d'une fusion. Les hommes doivent avoir une culture et
une vision communes ainsi qu'une manière de travailler
qui se traduit directement dans les SI, véritable
colonne vertébrale formalisant les processus en cohérence
avec la stratégie.
Quels
autres leviers pour réduire les coûts ?
Plusieurs autres, à mettre en oeuvre
simultanément. Je reviens tout d'abord sur les
ressources humaines, c'est-à-dire les jours / hommes
dont dispose l'entreprise. L'enjeu est d'optimiser leur
allocation, leur qualité mais aussi la motivation
et la satisfaction des hommes. Si vous y parvenez, vous
avez en main une vraie valeur, c'est un point critique
pour les sociétés.
Ensuite, la gouvernance,
qui n'est pas du seul ressort du directeur informatique
mais de toutes les couches dans l'entreprise. La direction
générale cadre les budgets, les hommes "métiers"
les traduisent en besoins fonctionnels et, finalement,
les hommes de l'informatique construisent les outils adéquats.
La gouvernance définit les règles du jeu
qui permettent d'aligner tous les acteurs. Avec des relations
de prestataires internes, quasi commerciales, qui se mettent
en place pour suivre le service rendu.
Enfin, la partie "études et développement"
: des outils qui permettent de mesurer la valeur gagnée
et d'optimiser la performance en rationalisant les infrastructures,
en mode "gestion de projet".
Comment
concilier investissements lourds et adaptabilité
à toute épreuve aux conditions du marché
?
Effectivement, les investissements massifs
que les sociétés du secteur banque-assurance
ont effectués ces dernières années
dans leur SI peuvent sembler problématiques quand
on connaît le degré de réactivité
qu'exige le marché, en termes de nouveaux produits,
de modernité et de niveau de service aux clients.
Le risque existe bel et bien de voir les technologies
devenir rapidement caduques dans ces conditions.
C'est justement le rôle de l'intégration,
des EAI, du middleware que de venir puiser dans ces énormes
infrastructures pour développer des processus de
contact client ou d'aide à la vente toujours plus
avancés, ce qui préserve et sécurise
le patrimoine informatique de l'entreprise. L'architecture
globale ne change pas tous les ans, mais les connecteurs
mis en place permettent en revanche de suivre le rythme
annuel des nouveaux services à lancer sur le marché.
Quel
rôle jouent les technologies internet dans cette
nécessaire adaptativité ?
Les
technologies internet permettent de pousser le service
chez le client. L'avantage d'un navigateur, c'est qu'il
est universel, connu et reconnu de tous. Cela permet d'utiliser
les actifs de l'entreprise. Mais la technologie s'arrête
là car elle ne permet pas de naviguer dans les
mainframes de l'entreprise, d'où la nécessité
de développer les couches intermédiaires
dont je parlais précédemment.
Et
l'externalisation informatique ?
L'externalisation
est un moyen de rationaliser tout ou partie de son informatique
mais il faut que l'entreprise soit prête à
le faire, j'entends par là que si elle ne maîtrise
pas suffisamment ses processus en interne, le fait de
les exporter ne changera rien. Autre critère
de succès : une charte de service doit être
établie avec le prestataire, les choses doivent
être toujours mesurables.
Mais le point le plus critique dans l'externalisation,
c'est la prise en considération de l'évolution
du marché par le prestataire. Je suis partisan
d'une externalisation "transformationnelle",
par opposition à ponctuelle ! Il faut en effet
inclure un composant qui permette de suivre la stratégie
de l'entreprise. Après plusieurs années,
un prestataire doit vous rendre votre système
informatique à l'état de l'art, transformé
et ayant suivi les évolutions.
Par exemple, cela peut concerner la généralisation
du tiers payant, dans le secteur de l'assurance maladie,
ou une fonctionnalité permettant de suivre un
client qui déménage... Le coût de
la prestation d'externalisation n'est
donc pas le seul critère de négociation
!
Les solutions progicielles doivent-elle rentrer
dans le champs d'action de l'externalisation ?
Au début, les ERP avaient
une fonction de gestion (automatisation des processus
de gestion), ils ont ensuite convergé vers des
progiciels orientés métiers. L'offre progicielle
de demain consistera à mon sens à externaliser
une partie de ces processus métier, c'est ce qu'on appelle
le BPO : Business Process Outsourcing. Le prestataire
développe et transforme les processus métiers et les
systèmes qui les accompagnent. Concrétement,
cela peut prendre la forme de plates-formes, de centres
de gestion des systèmes comptables ou assurantiels par
exemple.
|