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Frédéric Bedin
Vice-président
CroissancePlus |
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Frédéric Bedin
"Les présidentiables doivent gommer les effets de seuil pour les PME innovantes"
A l'occasion des
présidentielles, JDN Solutions lance une série d'entretiens
pour mieux comprendre ce dont peut bénéficier
le secteur informatique durant la campagne, et après.
Frédéric Bedin plaide ainsi pour que les PME puissent
plus facilement créer des emplois.
12/01/2007 |
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JDN
Solutions. Quelles sont les préoccupations de CroissancePlus
dans la campagne présidentielle qui va se dérouler en
2007 ?
Frédéric Bedin. Une remarque d'abord,
CroissancePlus ne représente pas particulièrement le secteur
informatique car seuls 10 à 15% de nos membres en font
partie. Nous cherchons surtout à développer l'esprit d'entrepreneur,
et à créer un cadre de travail suffisamment souple pour
ne pas trouver des patrons visant le seuil des 10 ou 49
salariés afin d'éviter des problèmes de croissance.
Notre
demande à ce sujet vis-à-vis des candidats serait de mettre
en valeur le fait que les entreprises sont celles qui
créent de la valeur et du travail en France. Et les PME
pourraient créer davantage d'emplois encore qu'actuellement,
de l'emploi généralement pas délocalisable. Cependant
elles subissent une pression fiscale, sociale et psychologique,
qui les empêche de grandir.
Est-ce un discours que vous
retrouvez chez les principaux candidats ?
Non, j'ai l'impression en écoutant Ségolène Royal, Nicolas
Sarkozy ou François Bayrou qu'il faut bien des entrepreneurs
pour qu'il y ait de l'emploi. Ils font preuve de beaucoup
de prudence en parlant de l'entreprise pour ne pas être
perçus comme des alliés du Medef. Or les "patrons
voyous", pour reprendre les propos de Nicolas Sarkozy,
ce ne sont que quelques cas isolés, pas les 500 000
patrons qui créent des emplois.
De même, quand Ségolène Royal dit "je n'aime pas les riches",
c'est peut être démagogique mais cela se répercute à l'international
en ne donnant pas à la France l'image d'une terre d'accueil.
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Les
entreprises qui créent le plus de propriété
intellectuelle sont celles qui créeront à
terme le plus d'emploi" |
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Vous soutenez un certain nombre
de thèses du rapport Levy / Jouyet paru en novembre dernier
pour le compte du gouvernement. De quoi s'agit-il ?
Dans l'informatique et plus généralement dans le monde
de la création, les entreprises qui créent le plus de
propriété intellectuelle sont celles qui créeront à terme
le plus d'emploi. La question de ce rapport porte sur
la valorisation des actifs immatériels en France. Le rapport
insiste sur la nécessité pour ces entreprises d'une plus
grande sécurité juridique, et je rajouterais une plus
grande sécurité fiscale.
Qu'entendez-vous par une plus
grande sécurité fiscale ?
Concrètement il faut faire baisser la pression fiscale
pour une entreprise du secteur du logiciel. Aujourd'hui,
vous avez plus intérêt à monter votre société en Suisse
ou en Belgique car vous paierez seulement 17% d'impôts
ou lieu de 32%. Une proposition intéressante serait de
mettre en uvre un impôt progressif pour les PME.
Vous évoquiez en préambule
une pression sociale, quelle est-elle ?
Pour une entreprise de 5 salariés, prendre un employé
en plus est un risque considérable et si vous avez fait
le mauvais choix, vous ne pouvez plus faire marche arrière.
Or, nous savons bien que ce n'est pas en recrutant un
CDD qu'on pourra faire grandir une entreprise. Donc, encore
une fois si vous voulez travailler dans le milieu très
fluctuant de la création, vous aurez tendance à regarder
ailleurs qu'en France pour créer votre société.
Il ne s'agit pas seulement d'avoir un droit social moins
cher, quoique, mais en tout cas des conditions plus équilibrées
entre patron et salarié. Londres est une ville chère,
mais lorsqu'un salarié et son entreprise ne s'entendent
plus, ils peuvent se séparer à l'amiable.
Quelle solution préconisez-vous ?
La fin du CDI ?
Nous proposons une fin de contrat pré-négocié avant la
signature du CDI, avec des indemnités bien supérieures
à celles qui sont versées aujourd'hui, mais à la condition
qu'on limite considérablement le recours aux prud'hommes
par la suite.
De même, pour motiver les bons salariés à intégrer des
petites entreprises, il est normal de les récompenser
avec davantage de stocks options, en raison du risque
qu'ils acceptent de prendre. Faciliter l'intéressement
et la participation dans les PME est crucial.
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Faciliter
l'intéressement et la participation dans les
PME est crucial" |
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Et pour ce qui est de la pression
psychologique ?
L'image de marque des entrepreneurs est très mauvaise.
Concernant l'éducation par exemple, l'entreprise n'est
évoquée que très tardivement et seulement lors de sujets
sur le fordisme, le marxisme
Avec notre projet 100000entrepreneurs.com,
nous voulons faire en sorte que tous les patrons de France
aillent au moins une fois par an dans les écoles.
Aujourd'hui, l'apprentissage est perçu comme une seconde
voie pour ceux qui ont raté la formation initiale. Il
y a un autre problème, il faut intégrer une formation
en entreprise d'au moins 2 mois aux professeurs pour qu'ils
n'aient pas de vision faussée. Certains passent directement
du statut d'élève à celui de professeur.
Dernier point, les meilleurs de nos étudiants devraient
être incités à créer des entreprises et non pas à devenir
cadre dans des grands groupes ou à entrer au service de
l'Etat. Or aujourd'hui, ce sont souvent les moins bons
élèves qui s'engouffrent dans les filières d'entrepreneurs.
Revenons sur la propriété intellectuelle,
faut-il selon vous que le candidat à la présidentielle
s'exprime sur la brevetabilité en Europe ?
Pour moi, c'est un combat d'arrière garde. Les brevets
existent en France, mais il est vrai que si nous pouvions
disposer d'un brevet européen simplifié et valable dans
tous les pays, cela nous arrangerait. Toutefois, il n'y
a pas que le dépôt du brevet qui doit être simplifié,
mais aussi son exploitation pour en tirer des revenus.
Il faut également éviter les impôts sur les droits d'auteurs.
Faut-il prendre des mesures
pour enrayer la désaffection des étudiants pour les matières
scientifiques et techniques ?
Il y aurait intérêt à présenter la partie créative du
métier plutôt que l'aspect technique. Un jeune est bien
plus motivé pour rentrer chez Apple, qui a une image de
société créative et innovante, plutôt que chez un de ses
concurrents. Il faut mettre ces métiers en perspective
par rapport aux autres métiers de la création.
Le budget pour la recherche
doit-il être augmenté ?
Non je ne pense pas.
Et quel bilan tirez-vous des
pôles de compétitivité ?
Ils fonctionnent bien, mais il est encore trop tôt pour
en tirer des conclusions. C'est une bonne idée, mais qui
doit être plus offensive. D'autre part, seules les grandes
entreprises étaient concernées au début. A Grenoble, le
pôle en nanotechnologies n'avait pas connu ce problème
car la réunion des acteurs de la région s'était fait spontanément.
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Il
faut aider le père de famille à
investir dans des sociétés technologiques
à risque" |
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La création d'entreprise doit-elle
être encore simplifiée ?
Grâce à la loi Dutreil, créer une entreprise en France
est devenu quelque chose de facile. Mais il est plus dur
de trouver l'argent pour la faire grandir à ses débuts.
Des mesures sont en train de passer pour favoriser fiscalement
l'investissement mais il faut aller plus loin et aider
le père de famille à investir dans ces sociétés.
Les mesures environnementales
risquent-elles de vous freiner ?
Non, c'est un sujet auquel nous sommes attentif. Nous
avons créé à CroissancePlus une commission sur le développement
durable. Ce sera un élément de différenciation entre les
pays développés et les pays émergeants. Et les mesures
environnementales peuvent servir de barrière à l'entrée
du marché, sans avoir à placer des mesures fiscales ou
douanières. Il est certain que les entreprises technologiques
devront développer en France une éthique aussi bien environnementale
que sociale.
D'ailleurs, je pense dans ce cadre que l'Europe est très
importante. Les politiques doivent utiliser l'Europe pour
créer un ensemble de contraintes homogènes à tout point
de vue : environnementales, sociales et fiscales. Mais
globalement, je vois les contraintes environnementales
comme quelque chose de très positif. Cela va nous amener
à développer des technologies innovantes, que l'on pourra
breveter et ainsi reprendre un rôle de locomotive mondiale
face aux sociétés américaines.
Attention toutefois, si les américains sont en retard
sur ce sujet, il nous rattrape peu à peu au niveau de
la prise de conscience de cette problématique. Et comme
ils ont les moyens et les technologies pour eux, ils peuvent
nous rattraper très vite.
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Propos recueillis par Yves DROTHIER, JDN Solutions |
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PARCOURS
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Frédéric Bedin, est le vice-président de l'association CroissancePlus, qui regroupe des sociétés à forte croissance, et directeur général de la société Le Public Système.
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