Outre sa position de première
SSII mondiale, l'américaine EDS se caractérise
en ce moment par une importante présence médiatique
due notamment à ses orientations fortes dans l'e-business.
De passage à Paris à l'occasion de la conférence
"e-Services World" organisée entre autres
par Hewlett Packard les 13 et 14 mars au Caroussel
du Louvre, le président d'EDS International Philip
Crawford a bien voulu répondre à quelques-unes
de nos questions.
Propos recueillis le 13 février 2000 par François
Morel
JI:
Quelle est la stratégie e-business d'EDS ?
Philip Crawford : Nous avons en fait plusieurs stratégies
e-business. Notre division AT Kearney de conseil en stratégie
et management dispose de milliers de consultants qui opèrent
à travers le monde. Ils sont capables de discuter
des besoins d'une société dans le domaine
de l'e-business. En général, ce que cherchent
les entreprises est l'automatisation e-business de la chaîne
logistique. Nous avons créé la joint-venture
CoNext avec Ariba afin de répondre à cela
en permettant l'e-procurement via Internet. En interne,
nous utilisons le logiciel e-breviate qui nous permet de
gérer 1 milliard de dollars d'enchères.
Où
en êtes-vous avec EDS CoNext ?
Nous
venons juste de lancer l'offre de services d'e-procurement
d'EDS CoNext en Europe. Nous sommes en train d'identifier
les sociétés que nous mettrons ensemble sur
les plates-formes B-to-B européennes. Pour l'instant,
nous ne pouvons pas les nommer, mais nous en parlerons durant
le mois qui arrive.
Quelles sont vos relations avec
Hewlett-Packard ?
Nous travaillons avec eux dans le cadre de CoNext. HP fournit
les serveurs, et aussi des services additionnels aux clients.
D'autre part, nous avons créé l'Interactive
Commerce Alliance (ICA) entre HP, Cisco et EDS, qui fournit
aux clients les services dont ils ont besoin pour une transition
fluide vers l'e-business. Parmi ceux-ci, on peut citer la
gestion des centres de données des sites Web, l'hébergement
d'applications et de sites, et des services de sécurité.
A
propos de sécurité, peut-on éviter
les attaques de "hacking" comme celles qui ont
eu lieu récemment (Yahoo, Amazon...) ?
Nous
proposons des services pour prévenir le hacking,
notamment en effectuant des audits sur la sécurité
des sites. Il est primordial de disposer d'un environnement
sécurisé pour faire de l'e-business. En fait,
ce n'est pas très difficile d'éviter les attaques.
Les logiciels qui permettent de monitorer le trafic et les
transactions sont déjà disponibles.
Selon
vous, comment les plates-formes e-business vont-elles se
démocratiser ?
Les
petites et grandes entreprises vont rapidement s'apercevoir
qu'elles ne peuvent concourir sans cela. Non seulement cela
leur permettra de rester compétitives, mais en plus,
elles devraient gagner plusieurs points de marge. D'autre
part, les décisions en rapport aux "exchanges"
sont probablement les plus cruciales. Les entreprises demanderont
donc uniquement à des sociétés en qui
elles ont confiance de leur délivrer ce type de services.
Que
pensez-vous de la tendance actuelle à la concentration
parmi les acteurs de l'informatique ?
La
vraie raison de ces rapprochements et fusions est que les
organisations réalisent que si elles ne prennent
pas avantage à l'e-business, elles finiront à
court de "business". La valorisation des dot.com
est très haute parce que le marché croit qu'elles
évoluent plus rapidement. Tout cela fait que les
grandes entreprises traditionnelles finissent par se dire
"je dois faire quelque chose, et je dois le faire vite
pour rester compétitif".
Quelles
sont les grandes tendances d'investissement des
entreprises
vis-à-vis de leur SI en l'an 2000 ?
Je
pense que le "supply chain management", la gestion
de la chaîne logistique, aura un rôle très
important. Mais d'un autre côté, nous pouvons
aussi constater le démarrage du CRM. Des sociétés
comme Siebel ou Oracle, qui témoignent d'une forte
demande en outils de gestion de la relation client, devraient
bientôt se lancer dans des sites de communauté
de demandes. Les entreprises utiliseront conjointement les
mêmes applications de CRM qui seront partagées
suivant la formule des ASP (Application service providers).
Je crois personnellement que les solutions de gestion de
la relation client seront de plus en plus vendues à
la manière des ASP.
Allez-vous
vous lancer sur le créneau des ASP ?
Nous
en sommes déjà un. Nous proposons les solutions
d'entreprise de SAP, Microsoft et Ariba en tant qu'ASP.
Notre stratégie est de fournir en plus la sécurité
des environnements modulaires qui font tourner ces applications.
Quelles
sont les technologies émergentes ?
Je
pense que le langage XML est la technologie clef pour l'avenir.
D'autre part, nous allons bientôt voir une redéfinition
des protocoles Internet et Corba. La standardisation des
logiciels est absolument cruciale. Dans les "exchanges",
les services doivent être intégrés avec
le système d'information de l'entreprise. D'autre
part, les sociétés doivent pouvoir communiquer
les unes avec les autres. Les standards basés sur
le protocole Internet ont encore de beaux jours devant eux.
Y
a-t'il des écueils à éviter lorsque
l'on met en oeuvre des technologies ?
Il
ne faut surtout pas sous-estimer les changements culturels
dans l'organisation des entreprises. D'un côté,
la technologie participe au succès des affaires.
Mais de l'autre, toute une palette de services est nécessaire
afin d'accompagner l'entreprise dans ces évolutions.
Sans cette gestion du changement, les technologies fonctionneront
mais l'organisation ne saura pas toujours s'en servir de
manière efficace.
Cela
change-t-il du tout au tout la vision que l'on peut avoir
de l'entreprise ?
Oui.
Les entreprises sont en train de se focaliser sur leur métier
et de laisser les compétences annexes à d'autres.
L'externalisation en est aujourd'hui à son commencement.
L'important est d'abord de comprendre pourquoi ce changement
doit être opéré. Il ne s'agit pas seulement
de réaliser des économies, mais aussi d'avoir
l'opportunité de travailler plus vite et moins cher.
Et donc, de travailler plus intelligemment.
En
novembre 1999, Philip Crawford rejoint EDS en tant
que président d'EDS International. Pour cela, il
quitte ses fonctions de vice-président d'Oracle,
qu'il occupait depuis 1995 d'abord pour la zone couvrant
la Grande-Bretagne et l'Irlande, puis au niveau corporate
à partir de 1998. Auparavant, ce britannique reconnu
outre-manche comme un chantre médiatique des technologies
avait travaillé chez Bull, qu'il a aidé
à prendre le virage des services et du conseil.
Diplômé en métallurgie à l'école
polytechnique de Sheffield en Grande-Bretagne, Philip
Crawford a entamé sa carrière chez l'éditeur
MSA (Management Science America).
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