L'Internet mobile fait fantasmer nombre d'acteurs de la
Nouvelle Economie : opérateurs, dot com et analystes.
Le principal attrait réside avant tout sur le marché
potentiel représenté par les détenteurs
de téléphone mobile : des dizaines de millions
à travers le monde. Néanmoins, le Wap, le
standard en vigueur pour le déploiement d'applications
transactionnelles sur les GSM, suscite encore la méfiance
des entreprises. Nombre de questions se posent dans la mise
en place d'une version mobile de son site tant en terme
fonctionnel que technique. Mais également sur la
pérennité des investissements opérés
face à l'arrivée des systèmes de nouvelle
génération GPRS et UMTS. Maurice Hazan fait
le point sur ces problématiques qu'il rencontre au
quotidien dans l'accompagnement des entreprises sur le Web.
Propos recueillis le 16 juin 2000 par Alexandra
Bissé
JDNet
Solutions : Tous les sites peuvent-ils prétendre
aujourd'hui à une version Wap ? Quelles sont vos
préconisations ?
Maurice Hazan: Des conditions inhérentes à
la nature même de la norme Wap sont incontournables
avant de se lancer dans ce projet. Ainsi les sites proposant
une forte dimension multimédia (rich media) seront
tout de suite limités dans la transposition de leur
activité à un format Wap...et par la bande
passante (9,6 Kbit/s). En fait les cibles potentielles des
services Wap résident avant tout dans les services
dits "immédiats". On ne va pas surfer sur
son GSM de la même façon que sur un site. L'information
doit être immédiatement disponible. Ainsi des
services de proximité, de vie quotidienne sont susceptibles
de connaître un franc succès : horaires d'avion,
la météo, le trafic routier ou encore la recherche
d'un restaurant. Le jeu semble prometteur également
comme en ont témoigné les expériences
menées au Japon par l'opérateur NTT Domoco.
Quelles
sont les précautions à prendre ?
Il
est impératif de définir les fonctionnalités
essentielles qui seront mises en oeuvre sur les terminaux
mobiles. Il n'est pas question de décliner l'intégralité
de son site en Wap ! Par ailleurs, il ne faut pas négliger
les évolutions constantes du standard notamment autour
de la sécurité ou des possibilités
fonctionnelles (la version 1.1.3 apporterait de nouveaux
moyens en terme de push d'information). Ensuite se pose
le problème de l'implémentation et de l'adaptation
aux différents modèles de portable. La version
conçue pour le 7110 de Nokia ne fonctionnera pas
forcément sur le modèle Trium de Mitsubishi.
Enfin, les entreprises aspirant au Wap devront également
tenir compte de la visibilité sur les portails des
opérateurs qu'il s'agisse du portail de France Télécom,
SFR (vizavi) ou encore celui de Bouygues attendu en septembre
(nom de code : sixième sens).
A l'heure où les opérateurs se livrent bataille
pour la commercialisation de leur offre Wap, c'est le bon
moment pour se faire référencer sur leur portail.
Quelles sont les problématiques
en matière de sécurité ?
En théorie les risques sont faibles, néanmoins
on observe certaines défaillances à l'heure
actuelle lors du franchissement des données sur le
réseau GSM au niveau de la passerelle Wap. Le cryptage
en SSL (norme de cryptage des données sur le réseau
IP) se trouve rompu lors de la transmission à la
passerelle
qui convertit ce cryptage à la norme WTLS (norme
de cryptage des données sur le réseau mobile).
Dans la version 1.3, ces problèmes devraient être
résolus.
Quelles
sont les étapes de mise en oeuvre "d'un site
Wap" ?
En
fait, un projet Wap s'appuie complètement sur l'existant
pour le développement des applications, on appelle
cet existant au travers de CGI ou d'ASP par exemple, le
seul travail résidera dans la présentaion
de ces applications en WML. La difficulté dans cette
démarche reste l'adaptation de cette présentation
aux différents supports qu'il s'agisse des différents
modèles de mobiles ou bien d'autres supports tels
les assistants numériques, ou encore les futures
télévisons Web.
En fait, la solution résiderait dans une redéfinition
de la structure des données au format XML en tant
que format pivot. A partir du contenu ainsi structuré,
il sera possible de générer au format adéquat
une présentation aux différents terminaux.
Face à la multiplication des moyens d'accès
à l'information, XML semble une réponse appropriée
pour unifier l'accès aux données.
La
pauvreté de l'ergonomie du terminal Wap préfigure,
pour certains une espérance de vie courte face à
l'avénement des standards tout IP (GPRS, UMTS). Quelle
est votre opinion ?
Vous
savez, la connexion change, la vitesse s'accroît certes
mais le terminal reste le même avec ses deux caractéristiques
majeures : sa petite taille et son autonomie limitée.
Ainsi les applications décrites plus haut, autorisées
par le Wap, ne perdent pas de leur intérêt
en dépit de l'apparition de ces nouveaux protocoles.
Selon moi, les opérations seront les mêmes.
Et le Wap connaîtra un temps de vie au moins égal
à un an ce qui est finalement assez long dans la
vie d'Internet. En revanche, ces nouveaux standards permettront
l'entrée de nouveaux acteurs sur ce marché.
Il deviendra possible de faire écouter un morceau
de musique et de délivrer des contenus plus riches.
Quelle
est la réalité actuelle des applications Wap
pour les usagers ?
Aujourd'hui
l'enjeu des temps de réponse sur les mobiles Wap
dépend avant tout de l'industrialisation des passerelles
développées par les opérateurs. La
qualité du développement impacte également
la qualité de réception des données
par l'usager. D'ailleurs pour être référencé
sur les portails de opérateurs, certaines conditions
sont imposées (pas plus de 10 lignes par page, navigateur
"page arrière" obligatoire...). La qualité
de réception est assez bonne à l'heure actuelle
ce qui s'explique par des volumes d'utilisateurs encore
réduits (20.000 à 30.000) et des transferts
de données qui le sont également...
Quelle
est la demande actuelle au sein de votre société
pour ce type de projet ? Quels sont les budgets consacrés
?
Nous
avons observé une petite "poussée de
fièvre" ces trois derniers mois qui semble désormais
plus ou moins retombée. Les entreprises restent prudentes
et attendent le lancement des différents portails
opérateurs ainsi que la diffusion des terminaux.
En outre, on note un manque de ressources informatiques
pour gérer et maintenir ce nouvel accès ("wapmaster").
Au niveau des budgets, tout dépend du spectre fonctionnel
attendu. Il est possible de faire quelque chose de simple
et d'efficace pour quelques dizaines de milliers de francs.
Quand on commence à raisonner en terme d'infrastructure
(acquérir sa propre passerelle) par exemple, on peut
passer sur des budgets de l'ordre de centaines de milliers
de francs. Les développements autour de XML alourdiront
également sensiblement la facture...
Maurice
Hazan est Ingénieur de L'Ecole Centrale de Paris. Après
avoir commencé sa carrière au sein de la Direction Informatique
du Groupe Total où il a mis en place l'infocentre et démarré
l'informatique individuelle, il est un des fondateurs de
la SSII NUCLEUS en 1988. Au sein de Nucleus, il met en place
successivement un département de création et de distribution
de produits d'interconnectivité et un département de conseil
en monétique. Nucleus représente plus d'une centaine de
consultants au moment de sa vente au groupe Sogeris en 1994.
Après cette vente, Maurice Hazan, en collaboration avec
le PDG de SOGERIS, s'occupe de mettre en place une filiale
de capital développement, Investec, qui investit dès 1995
dans des start up israéliennes, aujourd'hui cotées
au Nasdaq, et qui s'occupe de leur commercialisation en
Europe. Maurice Hazan a aujourd'hui en charge le développement
de I2 Net Interactive, filiale de développement Internet
du Groupe Masterline.
Pour
en savoir plus
I2
Net Interactive, filiale du groupe Masterline,
prévoit un CA de 6 MF (voir
article)