Nouveaux produits, nombreux partenariats, croissance
externe... Depuis près d'un an, l'actualité
concernant Siebel Systems est toujours foisonnante.
En ce début d'année, les résultats
records de 1999, récemment annoncés,
parlent d'eux-même : + 109 % pour
le chiffre d'affaires et + 127 % pour les
bénéfices du dernier trimestre 1999
par rapport aux trois derniers mois de 1998. Petit
point sur la stratégie et la vision du marché
du 1er éditeur mondial de progiciels de gestion
de la relation client (CRM).
Propos recueillis le 28 janvier 2000 par François
Morel
JI:
Qu'est-ce qui, selon vous, explique le mieux vos résultats
mirobolants ?
Fred Hessabi : Une attention toute particulière
sur la relation client. Nous proposons une qualité
de produit très robuste tout en nous développant
sur un marché qui croît très vite.
Nous sommes aujourd'hui sur un rythme annuel de plus
d'un milliard de dollars au 31 décembre
1999, pour notre sixième année d'exercice.
La première année, notre chiffre d'affaires
était de 8 millions de francs seulement.
C'est la plus forte progression de tous les temps
dans le secteur de l'informatique, devant Microsoft
et Oracle. En plus, nous avons été classés
premiers des classements Fortune 500 et Deloitte &
Touche en fonction de notre croissance et de notre
qualité de revenu. Tom Siebel fait partie des
25 premiers dirigeants de l'année, et
notre progiciel Siebel'99 a été élu
parmi les 10 produits les plus importants en
1999.
Quelle
est la vision de Siebel sur le marché de la
relation client ?
Avec
l'explosion du commerce électronique, le marché
du front-office pour la gestion de la relation client
a changé. Nous en arrivons maintenant à
l'e-business. Auparavant, nous étions dans
un monde où le fournisseur de services définissait
son mode d'accès.
Avec l'avènement d'Internet et du commerce
électronique, c'est désormais le client
qui choisit son canal d'accès. Il devient donc
indispensable que le décideur puisse tracer
et suivre l'ensemble des interactions qu'un client
peut avoir avec son entreprise, quel que soit le canal
choisi. Le marché du CRM explose littéralement.
En 1999, il dépasse celui des ERP (progiciels
de gestion intégrés).
Comment
expliquez-vous cela ?
L'unité de mesure est le nombre d'utilisateurs. Sur
le marché du pétrole, c'est le baril. Or,
dans une entreprise normalement constituée, on doit
trouver plus de collaborateurs qui s'occupent de l'avant-vente,
de la vente, de l'après-vente et du marketing, que
de personnes chargées des comptes ou des stocks.
Quel est aujourd'hui l'enjeu
majeur ?
Le monde a basculé en donnant de plus en plus de
pouvoirs aux clients, qui sont dans le même temps
de mieux en mieux informés. L'e-business, c'est ça.
C'est le basculement vers le client. L'ère du marketing
de masse est révolue. Nous entrons maintenant dans
celle du marketing individuel.
Comment y répondez-vous
?
Siebel se retrouve aujourd'hui au coeur même de ce
débat. Nous fournissons des programmes capables de
gérer et de suivre l'ensemble des relations clients
à travers des canaux qui peuvent être un centre
de télémarketing, une messagerie, une hotline,
un site Web, des techniciens sur le terrain, etc.
Quel
rapport faites-vous entre le CRM et l'e-business ?
Une
entreprise ne peut pas se lancer dans l'e-business
sans faire appel au CRM, à moins de vouloir
faire le bonheur de ses concurrents. Selon nous, l'e-business
est l'ensemble des moyens qui permettent à
une entreprise de suivre les interactions d'un client
à travers un canal supplémentaire, le
Web, qui doit être bien géré.
Cela ne veut pas dire que toutes les transactions
du monde vont passer par Internet. Les hommes de terrain
ne vont pas disparaître pour autant.
Comment
se présente votre offre ?
Nous
couvrons horizontalement la totalité des fonctionnalités
de front-office : force de vente, appels entrants
et sortants, marketing et automatisation du marketing,
avec en plus tous les outils de décisionnel.
Par ailleurs, nous avons verticalisé notre
offre en intégrant des workflow, des processus
métiers. De fait, nous proposons maintenant
9 solutions pour différents secteurs d'activité
comme la banque, la finance et les assurances, les
télécommunications, l'énergie,
l'industrie pharmaceutique...
Quelles
sont les solutions les plus demandées par vos clients
?
Notre
chiffre d'affaires est pratiquement partagé
à moitié-moitié entre les entreprises
qui veulent installer l'ensemble des outils en un
bloc, et celles qui restent dans la démarche
d'une seule fonction en accusant juste un retard dans
le temps. Mais d'après moi, il n'y a en fait
aucun intérêt d'avoir des commerciaux
automatisés si le centre d'appels ne peut pas
communiquer avec eux sur le terrain.
Quelle
est votre stratégie ?
Nous
couvrons l'ensemble de la fonction et nous représentons
65 % du marché mondial du CRM en nombre de logiciels
vendus. Nous cherchons donc à garder ce leadership,
en tenant compte du changement de la donne, car le client
dispose désormais d'un pouvoir accru de sélection.
Et
votre politique de croissance externe ?
La
dernière version de notre solution Siebel 2000
intègre des modules de connection à
tous les ERP du marché. Nous n'avons donc pas
de raisons de nous lancer dans la commercialisation
de ce type d'outils. Concernant notre croissance organique,
nous envisageons des acquisitions surtout dans le
domaine des sociétés de services, et
en particulier en Europe. Nous avons lancé
un programme "executive residence" à
Paris, où l'ensemble des cadres dirigeants
du groupe ont l'obligation de passer quelques mois
par an avec leur famille. Cela part pour nous d'une
volonté d'européaniser l'entreprise
Siebel.
Pourquoi
privilégiez-vous le Vieux Continent ?
Le marché
européen représente 360 millions de consommateurs.
Siebel a très bien compris le rôle que l'Europe
joue dans sa croissance. Nous ne voulons pas forcément
nous reconnaître comme une entreprise américaine.
Notre fondateur Tom Siebel était en France la semaine
dernière juste avant de se rendre au forum de Davos.
Nous lui avons acheté un grand appartement où
il vient de temps en temps avec sa famille. Cela a permis
à Siebel d'acquérir plus rapidement une maturité
sur le marché européen.
Quelles
différences voyez-vous avec le marché américain ?
Aucune. Les cadres répondent
aux mêmes objectifs. Nous observons juste un petit
décalage dans le temps du côté du
marché des consommateurs. Mais ce décalage
varie d'un domaine à l'autre. Sur le marché
des téléphones mobiles, l'Europe a même
dépassé les Etats-Unis.
Selon
vous, quelle technologie va tout changer ?
Il en existe beaucoup. Internet
est une donnée très importante que l'on
peut comparer avec l'invention de la roue. Les éléments
sont là et il faut suivre les évolutions,
notamment dans les domaines d'Internet et du GSM.
Quels
conseils donneriez-vous aux entreprises qui veulent s'équiper
?
Dépêchez-vous, ça
va trop vite ! Cela se voit au niveau de notre croissance.
Nous n'avons pas forcément les meilleurs de tous
les commerciaux. Seulement, nous avons des cycles de vente
et de transactions très courts. Notre chiffre d'affaires
lui-même doit faire réfléchir. D'ailleurs,
Tom Siebel en personne est invité régulièrement
pour expliquer, à la demande des entreprises et
devant le parterre de leurs dirigeants, pourquoi il faut
s'équiper informatique, CRM et e-business.
A
quoi ressemblera donc l'entreprise de demain ?
Il y aura toujours des produits,
des vendeurs et des clients. L'organisation pourra changer
mais pas les processus de vente. L'enjeu pour les entreprises
est de réduire leurs cycles de transactions afin
de coller aux objectifs de + 20 % par rapport
à l'année précédente. Il faut
pour cela une information pertinente, en particulier dans
le domaine de la relation client.
Diplômé
du CERAM et titulaire du MBA de Concordia au Canada,
Fred Hessabi a démarré sa carrière comme ingénieur
commercial chez CCMC. Il intègre ensuite
le poste de directeur commercial chez MSA (Management
Science America) devenue par la suite Dun & Bradstreet
Software, aujourd'hui GEAC. En 1994, il prend la
direction générale de SSA France (Systeme Software
Associates). Fin 1997, Fred Hessabi ouvre les filiales
de Siebel Systems en Europe du Sud (France, Italie,
Espagne et Portugal) et assume la fonction de directeur
général du groupe dans cette région.
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