La mode de l'année 2000 est définitivement
tournée vers le CRM - l'e-CRM pour les plus
branchés -, la connaissance des clients et
la gestion du churn. François Laxalt, responsable
de marché CRM et datamining chez SAS Institute
indique quelles sont les étapes à ne
pas brûler pour ne pas rater sa gestion de la
relation client et fait le point sur la stratégie
de SAS Institute dans ce domaine.
Propos recueillis le 18 janvier 2000 par Alain
Steinmann
JI:
Comment est composée votre activité, quels
sont les domaines qui explosent?
François Laxalt: Le datawarehouse représente
environ 50% de notre activité, le datamining
25% et le piltotage et le reporting les derniers 25%.
De toute façon, les très gros contrats
incluent la partie datawarehouse et le datamining.
Cette année, nous voyons clairement une explosion
de la gestion de la relation client, le CRM. Alors
que les budgets étaient jusqu'à présent
bloqués sur l'an 2000, nous percevons maintenant
l'émergence de nombreux nouveaux projets.
Où
en sont les entreprises françaises, ont-elles compris
l'enjeu de la gestion de la relation client ?
L'immense
majorité des entreprises a conscience que le client
est important. Mais bien sûr, il y a des entreprises
qui s'y sont mal pris, notamment chez les grands comptes.
Elles ont cru que pour faire de la gestion de la relation
client, il fallait avoir un call center. Une erreur car
ce n'est pas un call center qui va booster les ventes, c'est
mettre la charrue avant les boeufs.
Les projets réussis demandent une partie de réflexion
sur les clients: il faut sélectionner qui on va appeler
et quel produit on va proposer. Les échecs que nous
constatons sont souvent liés à un oubli de
la partie stratégique de réflexion.
Plus généralement, 50% des entreprises sont
vraiment en retard dans leur gestion de la relation client.
En fait, il y en a très peu qui sont vraiment au
top. Les organismes de crédit sont en avance, les
vépécistes pas mal, les banques essayent d'y
arriver.
Quels conseils donnez vous aux
entreprises alors ?
Le facteur clé le plus important, c'est l'engagement
de la direction générale qui doit considérer
que le CRM est le projet le plus important de l'entreprise.
Il faut ensuite nommer un responsable CRM, sinon les gens
auront tendance à se tirer dans les pattes.
Nous constatons souvent dans le cahier des charges une sous
estimation du coût d'un projet CRM. Il ne faut pas
oublier que c'est du one shot. On sous estime trop souvent
le coût nécessaire à la vie d'un projet.
Et
le plus gros défaut de la plupart des projets ?
C'est
de vouloir tout faire tout de suite. Du coup, le projet
devient une véritable usine à gaz et
nécessite deux ans pour être mis en place.
La vraie méthodologie de projet c'est un peu
"think big, start focused". En clair, ne
commencez pas avec un call center ou une base de données
mais avec un problématique précise en
sachant quelle est l'architecture cible. Cela permet
d'avoir un retour sur six mois et aux équipes
d'apprendre au fur et à mesure. L'objectif
final est d'arriver à mélanger les compétences:
impliquer les compétences informatiques, commerciales
et marketing.
Comment
vous situez vous par rapport à vos concurrents en
CRM qui sont arrivés en France récemment ?
Nous
sommes complémentaires avec des offres comme celles
d'Onyx ou de Siebel. Nous nous situons du côté
du CRM analytique par rapport au CRM opérationnel
de ces acteurs. Nous intervenons pour aider nos clients
à déterminer une stratégie en middle
office. Notre offre couvre le datawarehousing puis le pilotage
- reporting au 1er niveau. Ensuite, et c'est plus du datamining,
nous essayons de comprendre le comportement des clients
pour anticiper, prédire le produit qui a le plus
de chances d'être acheté par chaque client.
Nous avons développé des moteurs d'accès
pour interagir avec les outils de type frontoffice pour
que leur information soit bien utilisée. En clair,
nous faisons vraiment de l'optimisation.
Comment
décider les entreprises à adopter un outil
de CRM après les déceptions relatives de l'ère
ERP ?
C'est
vrai que les gens se méfient après les ERP
qui n'intégraient pas forcément la notion
de ROI, retour sur investissement. Notre démarche
est basée sur le proof of concept, la preuve rapide
de ce que nous mettons en place. Une étude du Gartner
indique que le CRM est rentable en deux ans mais quand le
projet est bien ficelé, ça peut ne durer qu'un
an. Sur les mailings, ça peut être très
rapide. Un vépéciste parmi nos clients a prouvé
qu'il économisait 500.000 francs sur un mailing avec
notre stratégie. Comme il fait des dizaines de mailings
chaque année, le ROI est atteint en trois mois.
Quel
est le délai nécessaire à la mise en
oeuvre d'un projet CRM ?
Nous
nous engageons à fournir une première
salve fonctionnelle sur une problématique précis
dans un délai de trois mois. Ca peut aller
jusqu'à six mois sur des problématiques
beaucoup plus complexes.
L'e-CRM
est-il développé en France ou n'est-ce qu'un
effet de mode ?
Honnêtement,
on en voit peu. Il faut déjà avoir un CRM
pour passer à l'étape suivante de l'e-business.
Les premiers implémentations concernent l'optimisation
de la force commerciale et le mailing car c'est là
que 99,9% du chiffre d'affaires se fait aujourd'hui, il
ne faut pas se leurrer. Nous avons un certain nombre de
clients qui commencent à utiliser des technologies
type BroadVision, plus à l'étranger qu'en
France tout de même.
Vous
avez tout de même une offre dédiée à
l'e-business...
Nous
avons une nouvelle offre qui s'appelle e-intelligence
et qui va répondre à ces problématiques.
Elle comprend trois parties. La première concerne
l'informatique pour garantir la qualité des
services sur le serveur web et d'en contrôler
les performances. Il s'agit d'un produit concurrent
d'un WebTrends mais qui a la capacité de traiter
les données en volumétrie contrairement
aux produits plus grands publics. La deuxième
partie concerne l'analyse des streams et la troisième
s'intéresse au datamining. Elle a pour but
d'optimiser l'arborescence du site avec l'analyse
du comportement de l'internaute et la prédiction
de son cheminement.
Avez
vous déjà fait une expérience d'interfaçage d'un
téléphone WAP avec un progiciel de CRM ?
Oui,
nous avons expérimenté une interface permettant
d'accéder à la base du CRM depuis un téléphone
mobile. Nous utilisons un peu de datamining pour cette application
qui calcule un score de risque pour un prêt à
partir des critères entrés dans le téléphone.
Il y a de toute façon des développements à
faire, nous avons une cellule de consulting dédiée
pour ça.
Nous voyons apparaître les premiers cahiers des charges
qui demandent un support WAP donc nous nous devons d'avoir
la technologie et je pense qu'il y aura des premiers projets
concrets cette année. Une explosion va se produire
l'année prochaine, c'est sûr. Ce qu'il faut,
c'est un outil unique avec un protocole unique, ce qui n'existe
pas encore à mon avis.
Vous
venez de lancer une offre centrée autour du churn,
dites nous en plus...
La problématique est
la suivante: ça coûte moins cher de
retenir un client que d'en attirer des bons. Une
société a plus d'informations sur
ses clients que ses concurrentes. Il faut donc savoir
retenir les bons clients qui vont partir. Nous proposons
donc une offre packagée de méthodologie
de management du churn et de datamining. L'objectif
premier est l'intégration au datamart. La
réflexion est quelles sont les données
à intégrer et les étapes sont
nombreuses: 7 en moyenne. Ensuite, il faut faire
communiquer cette solution avec des outils type
frontoffice pour agir et enfin quels sont les indicateurs
à renvoyer pour optimiser la campagne suivante.
Notre premier client sur cette offre est Cegetel.
Pour
finir, comment voyez vous cette année pour le CRM ?
Les entreprises vont mener des analyses
sur l'e-CRM mais peu de projets vont être lancés.
Seulement les entreprises qui étaient au top sur
le CRM vont se lancer dans l'e-business. Je crois beaucoup
aux domaines du churn et du cross-selling. Enfin, les
projets de toutes sortes qui végétaient
vont exploser.
Après
une formation en économie de l'entreprise et un DESS "
Techniques de décisions dans l'entreprise " à la Sorbonne
en 1993, François Laxalt entre à la direction marketing
de l'UAP en tant que chargé d'études marketing. Il prend
ensuite la responsabilité des études sur le marché de
l'assurance vie. En 1996, il rejoint SAS Institute en
tant qu'ingénieur consultant spécialisé dans le domaine
du marketing. En 1998, il prend la responsabilité du développement
des marchés du Data Mining et de la Gestion de la Relation
Client (CRM) au sein de la direction marketing de SAS
Institute.
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