Moins connue pour ses activités e-business, Sopra
est avant tout l'une des grandes SSII françaises,
spécialisée dans les secteurs de la banque
et des télécommunications. Dirigée
par Pierre Thauron, la direction e-business a pour but d'aider
l'ensemble du groupe à mettre en oeuvre des solutions
de mise en relation électronique d'un utilisateur,
qu'ils soient client, fournisseur, collaborateur ou partenaire,
avec un système d'information. Sopra, qui représente
4.200 personnes, a réalisé en 1999 un
CA de 2,1 milliards de francs. Elle espère atteindre
3 milliards de francs en 2000, dont près de
650 millions en provenance des activités e-business.
Propos recueillis le 7 juin 2000 par François
Morel
JDNet
Solutions : Que représente l'e-business pour Sopra
?
Pierre Thauron : L'e-business n'est pas restreint
chez nous à la commercialisation de produits et services.
La notion la plus importante est de faire communiquer un
frontal de communication avec le back-office d'une entreprise.
Cela implique trois thématiques très fortes :
la gestion de la relation à l'utilisateur ou la relation
client au sens large ; une approche EAI/middleware
pour l'intégration des applications les unes avec
les autres ; et la prise en compte de l'évolution
de la relation entre l'utilisateur et le système
d'information, notamment derrière la notion de canaux
multiples.
Naturellement, tout ceci doit être appuyé par
un accompagnement de notre client dans le changement organisationnel
que cela implique, entre autres dans sa relation avec ses
propres clients et dans l'evolution induite au niveau de
son back-office.
Quelles
sont les activités du groupe ?
En
terme de maîtrise des systèmes d'informations,
nous sommes un acteur important du marché. Mais nous
sommes aussi éditeurs de progiciels. Par exemple,
Sopra peut fournir tout le back-office d'une banque avec
un produit comme Evolan Pack, qui est une certaine forme
d'ERP bancaire. Nous éditons aussi des produits pour
d'autres secteurs d'activité comme l'immobilier ou
les ressources humaines. Nos progiciels sont également
amenés à suivre l'évolution du marché
en matière d'e-business. C'est par exemple le cas
d'Evolan Online qui permet à une banque d'ouvrir
ses services en ligne au travers d'un progiciel que nous
avons sorti en mars dernier.
Concernant les projets, ils se répartissent pour
le moment de façon équitable entre les solutions
B to B et B to C. Nous avons une demande très forte
de systèmes d'informations auprès des banques
et des opérateurs de télécommunications,
et ce pour deux raisons. Tout d'abord, ce sont deux marchés
en forte croissance. Et aussi, Sopra est un acteur important
dans ces deux secteurs. Nous sommes notamment leader dans
le domaine bancaire.
Comment procédez-vous
pour l'intégration entre les applications ?
Notre offre EAI (Enterprise application integration), pour
laquelle Sopra est presentée comme l'un des leaders
mondiaux, est un facteur différenciateur pour nous
sur les projets e-business. En effet, nous devons faire
communiquer les applications frontales avec le système
d'information afin que les deux puissent dialoguer facilement.
Pour gérer la différence de vitesse de fonctionnement
entre les deux, il faut une solution tampon d'EAI sur laquelle
Sopra est positionnée. Nous apportons notre expertise
sur ce sujet pour accompagner le client dans la mise en
oeuvre de ces solutions . Nous proposons notamment notre
offre "Règle du jeu" (ou RDJ) qui permet
de gérer les échanges inter-applicatifs au
coeur du back-office et qui dispose de connecteurs avec
les principaux ERP du marché, tels SAP R/3 ou Oracle
Applications et de plus en plus de solutions CRM. Enfin,
nous disposons egalement de XFB qui est un outil fiable
et securisé pour les échanges à travers
Internet.
Quels
problèmes techniques l'EAI pose-t-elle ?
Le
problème de l'hétérogénéité
des applications, qui est en partie résolu avec des
standards comme XML. Pour y répondre, nous sommes
en train de renforcer notre offre EAI avec une solution
front-office au standard XML. Elle utilisera XSLT pour la
conversion, la traduction, et tout ce qui est lien transactionnel.
Vous
venez de signer un partenariat d'intégration de leur
solution avec InStranet. Quelles sont les applications les
plus demandées pour les intranets ?
Les
grandes tendances sont les intranets de workflow avec une
masse de plus en plus considérable de contenu, qu'il
faut organiser à travers une solution simple. Cette
dernière doit en effet permettre à des non-informaticiens
d'apporter facilement du contenu et de l'intégrer
dans l'organisation prévue par le site intranet.
L'offre d'InStranet répond assez bien à cette
problématique, où l'on peut à la limite
se passer d'un webmaster. Le contenu est indexé de
manière simple et efficace pour que les lecteurs
puissent facilement et de façon personnalisée
trouver ce qu'ils recherchent. La tendance est clairement
à l'augmentation des flux et des volumes de contenus.
Comment
évolue la demande de vos clients ?
Nous
étions jusqu'à aujourd'hui dans la première
génération d'intranets mono-application et
mono-thème. Mais à présent, avec leur
nombre croissant, l'entreprise a du mal à s'y retrouver
et à communiquer d'un intranet à l'autre.
Aujourd'hui, les clients veulent tout remettre à
plat dans un intranet global, avec un portail d'entreprise
qui fédère les différentes applications
internes et autorise l'intégration de flux complémentaires
externes.
Quelles
est la principale problématique que vous rencontrez
dans l'exécution des projets ?
Ce
sont surtout les délais que nous réclament
nos clients, tant dans les réponses que dans la mise
en oeuvre. Notre grand défi aujourd'hui est de respecter
la qualité d'un grand projet informatique. Non seulement,
dans un projet qui met en oeuvre des technologies nouvelles,
nous sommes confrontés au problème de fiabilité
des solutions. Mais aussi, le fait de nous imposer des délais
très courts, 3 mois en moyenne, nécessite
de mettre sur pied des équipes importantes en un
minimum de temps. Et nous devons veiller à respecter
les critères de qualité qui font qu'une entreprise
choisit une SSII qui a "pignon sur rue".
Comment
vous organisez-vous pour répondre à ce
problème ? Avez-vous
déjà été confrontés à
des retards par manque d'effectifs ?
Jusqu'à
présent, nous sommes passés à côté
des écueils de ce type car nous ne voulons pas rentrer
dans l'exercice de tout accepter au départ pour signer.
Nous ne créons pas de listes d'attente. Nous préférons
en effet refuser un projet trop ambitieux ou trop gourmand
en ressources, plutôt que d'entraîner nos clients
vers des réalisations à l'issue incertaine.
Ce n'est pas toujours très commerçant, mais
cela nous permet de garantir à nos clients un respect
des délais et de budgets, et aussi d'assurer la solidité
de la solution mise en oeuvre. Le marché e-business
présente aujourd'hui un paradoxe, car il faut réduire
les délais sur des services critiques, fortement
sollicités et en forte visibilité, où
justement il est nécessaire de renforcer les recettes,
les charges et les tests de vérification de la solution.
Quelque part, la réduction des délais est
contraire à ce que l'on nous demande.
Comment
voyez-vous évoluer le métier des SSII ?
L'évolution
va vers une prise en charge des projets dans leur ensemble,
depuis le conseil stratégique qui comprend l'élaboration
du business plan, en passant par la définition du
cahier des charges et la mise en oeuvre, jusqu'à
l'accompagnement du client dans la vie de son projet. Ce
dernier aspect intègre les questions d'hébergement
et d'externalisation du service en proposant les applications
en ASP (Application services provider ou location d'applications
en ligne). Nous menons en ce moment une importante réflexion
afin de savoir si nous devons nous positionner sur le créneau
des ASP. Autrement, en terme d'accompagnement, la tierce
maintenance applicative est un métier qui va évoluer
également au travers des solutions e-business mises
en oeuvre. Nous nous devons d'être plus proches et
proactifs vis-à-vis des directions des entreprises,
de façon à les aider et les accompagner dans
leurs métiers au travers des projets e-business que
nous avons initialement mis en oeuvre à leur attention.
Ingénieur
de l'ESI, Pierre Thauron a d'abord passé 2
années chez Soleri, , une SSII Lyonnaise rachetée il y a
6 mois par l'allemand Debis IT Services. Il rejoint ensuite,
en 1992, la société RIS Technologies devenue
depuis CosmosBay, en tant que responsable de l'agence de
Paris. De 1998 à fin 1999, il prend la direction des opérations
de DataMedia, éditeur spécialisé dans les produits de gestion
des interactions (téléphonie, Web, WAP, télévision
interactive, etc.). Il rentre finalement chez Sopra en octobre
1999 pour piloter la direction e-business.