Plusieurs alternatives existent aujourd'hui pour
qui voudrait exploiter une suite bureautique en environnement Linux. La
toute dernière en date s'appelle CrossOver
Office, et est éditée par l'américain CodeWeavers.
Fondé en 1996 par certains développeurs du projet WINE (lire
l'article de JDNet Développeurs paru en août 2001, portant
sur l'outil CrossOver Plugin), l'éditeur propose aux utilisateurs
du système d'exploitation libre d'exploiter la suite bureautique
Office sous Linux comme s'ils travaillaient en environnement Windows.
Jusqu'à présent, il était quasi-impensable de séparer
les deux car ils ont été façonnés par le même
éditeur, Microsoft, à base de technologies propriétaires.
Avant tout, précisons que le système d'exploitation Linux
n'est pas encore déployé à grande échelle
sur les postes clients des entreprises.
Mais,
certaines y réfléchissent car il offre des avantages indéniables
par rapport à Windows. Pour commencer, l'environnement de Microsoft
est payant, et les coûts de ses licences et de celles de sa suite
bureautique standard Office se répercutent chaque année
sur les budgets informatiques. Cela a son importance comme on le verra
par la suite. D'autre part, un nombre croissant d'utilisateurs affirment
que l'alternative du libre offre davantage de sécurité,
de stabilité et une plus grande facilité d'administration
que Windows.
Première
approche : la gratuité avec OpenOffice
Nous nous arrêterons là
dans la comparaison entre les deux systèmes d'exploitation qui
affichent chacun des qualités et des défauts. Pour ceux
qui se sont décidés en faveur de Linux sur les postes clients,
la tâche quotidienne réclame donc l'installation d'une suite
qui comprenne des outils tels que le traitement de textes Word, le tableur
Excel, l'éditeur de diapositives Powerpoint et la base de données
Access qui figurent tous dans Microsoft Office.
"Il existe un certain nombre d'initiatives pour les utilisateurs
de Linux, qui visent à rendre accessibles des applications bureautiques
au plus grand nombre sur leurs postes de travail", déclare
Stéphane Fermigier, président de l'Association Francophone
des Utilisateurs de Linux et de Logiciels Libres (AFUL).
En la matière, "nous pouvons considérer deux grandes
approches. La première consiste à porter ou développer
sous Linux des suites bureautiques supérieures ou égales
en fonctionnalités à Windows. C'est le cas de StarOffice
de Sun et de son dérivé OpenOffice
qui est libre, mais aussi [...] d'un projet commercial issu d'une société
fondée par des anciens créateurs de ClarisWorks."
Emulation, virtualisation... et WINE
"La deuxième approche", continue-t-il, "consiste
à utiliser directement les logiciels Windows sous Linux. Elle regroupe
les possibilités offertes par l'émulation ou la virtualisation
(machines virtuelles). Par exemple, VMWare s'appuie sur la virtualisation.
De son côté, Win4Lin est un émulateur qui fonctionne
avec toutes les applications Windows. C'est ce que j'utilise personnellement.
Il permet d'utiliser Windows sans quitter Linux. Enfin, nous en venons
aux dérivés du projet WINE, qui est né en 1994 et
n'a pas encore atteint sa maturité. A l'heure actuelle, la probabilité
est faible qu'il puisse permettre à une application Windows de
tourner à fond sous Linux. Sa vocation est plutôt de permettre
à [l'éditeur] de porter facilement son logiciel Windows
sous Linux."
Cette dernière possibilité est le parti pris de CodeWeavers.
"La société CodeWeavers a été fondée
par les deux ou trois principaux créateurs du projet WINE",
précise le président de l'AFUL. "Ils se sont dit qu'ils
s'attaquaient à un chantier ardu, et donc qu'il fallait commencer
par le commencement. Leur idée a été de partir du
logiciel WINE et de se concentrer sur les fonctionnalités manquantes
de Linux. Dans un premier temps, il y a six ou huit mois, est sorti CrossOver
Plugin qui apporte une série de technologies (Windows Media Player,
QuickTime...) que l'on ne trouve pas dans Linux. Sorti plus récemment,
CrossOver Office représente un effort porté sur la compatibilité
avec Microsoft Office. Cela a dû être un travail dantesque,
puisqu'il faut lancer l'application dans WINE et la corriger à
chaque fois que cela plante."
Avant tout une question
de licences
L'approche de CodeWeavers n'est
donc pas la seule possible. Elle peut présenter des avantages,
mais aussi des inconvénients, selon l'optique dans laquelle se
place l'entreprise utilisatrice. Ainsi, CrossOver Office n'est pas gratuit.
Il peut être téléchargé sur le site de l'éditeur
pour environ 63 euros (55 dollars). Par ailleurs, "on n'arrivera
pas avec cette technologie à économiser sur les licences
Office", souligne Stéphane Fermigier. En revanche, on économise
la licence Windows, alors que pour VMWare et Win4Lin, il est nécessaire
de la payer. "Pour StarOffice et OpenOffice, il n'y a pas de licence
Microsoft à payer, et à mon avis la percée bureautique
sous Linux se fera sur ces deux-là."
Résumons. Si vous possédez déjà des licences
Office dans le cadre d'un parc bureautique que vous voulez faire migrer
de Windows vers Linux, l'alternative CrossOver Office s'avère intéressante
puisque vous n'aurez pas à repayer deux fois leur prix à
Microsoft. Dans le cas contraire, OpenOffice est une initiative libre,
sans aucun forfait à verser. Selon le président de l'AFUL,
"le vrai marché pour CodeWeavers est celui de la migration
des applications métiers. Leurs technologies peuvent aider les
entreprises à utiliser leurs logiciels dans la continuité,
en cas de migration sous Linux."
[François Morel, JDNet] |